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    Chapitre 26 : Gentillesse

     

     

     

    Mon putain de crâne est en train de me tuer.

     

    C'est la seule pensée qui anime mon esprit. Ma migraine empire, j'ai l'impression que je suis sur le point d'en crever. Je resterais bien couché ici si je pouvais mais quelqu'un me traîne quelque part, qui c'est bordel ?

     

    « Laisse...moi...j'ai envie de dormiiiiiir

     - Tu dormiras bientôt ».

     

    Je reconnais cette voix illico.

     

    « Phun...où...est-ce...que...tu m'emmèèèèènes? »

     

    Ça prend tellement d'énergie de sortir chaque mot, putain !

     

    « Au lit, pour que tu puisses dormir. Arrête de te débattre, s'il-te-plaît, t'es déjà assez lourd comme ça », me répond Phun alors qu'il place son bras autour de mes épaules.

     

    J'ai des vertiges et je me sens un peu nauséeux, comme si quelque chose s'apprêtait à remonter dans ma gorge.

     

    « On y est presque », dit-il.

     

    Entendre cela me fait me sentir un peu mieux. On fait tant bien que mal notre chemin jusqu'à l'étage, trébuchant de temps à autre. J'ai toujours l'impression qu'un truc cogne dans ma tête au moment où Phun ouvre une porte. J'ouvre mes yeux pour constater qu'on est dans...sa chambre. Je referme rapidement les yeux de nouveau.

     

     Pourquoi m'a-t-il amené ici, bordel ?! Je veux rentrer à la maison !

     

    « La maison ! Ramène-moi à la maison ! A la maison ! Je veux rentrer à la maisooooon ! »

     

    J'emploie toute la force qu'il me reste à me dégager de sa poigne quand je réalise où nous sommes. Mais en fait, je ne sais pas trop pourquoi je fais tout ce tapage exactement.

     Phun renforce sa prise sur mon bras.

     

    « Ne sois pas si têtu. Tu es complètement pété. Tu veux retourner chez toi pour que ton père t'en mette une, idiot ? ».

     

    Il ajoute quelques jérémiades à propose de je-ne-sais-quoi, le temps que je reprenne mes esprits, je me retrouve le dos contre un matelas confortable. On dirait le paradis. Mais je n'ai toujours pas l'énergie de me repositionner correctement pour bien dormir, cela dit. J'essaie de me déplacer un peu sur le lit, étant donné que je ne suis pas bien installé, et Phun finit par soutenir mon dos pour que je positionne mieux. Ma tête me fait tellement mal que je suis contraint de pousser son épaule pour l'arrêter.

     

    « Ca ira, Noh ? »

     

    Qu'est-ce que je suis censé lui dire ? Ma tête peut exploser à tout moment. Je n'ai même pas assez de force pour prononcer un mot en réponse.

     

    La migraine va de mal en pis, alors je me force à ouvrir les yeux. La première chose que je vois, c'est le visage de Phun Phumipat, assez proche pour que je puisse sentir son souffle. A la seconde où j'aperçois ces yeux noirs paniqués en train de me dévisager, j'oublie complètement ma migraine. Il y a dans les yeux de Phun une lueur si intense que vous ne pouvez pas vous en décrocher. C'est comme s'ils vous suppliaient de ne pas partir. Je fixe ces yeux brillants qui se rapprochent de plus en plus, lentement. Nos visages sont si proches qu'on peut parfaitement se détailler. Je sens la main de Phun caresser tendrement ma joue alors que nos lèvres se touchent.

     

    Mais...

     

    « Eurk ! Blouah ! »

     

    Urgence ! Urgence ! Évacuez les locaux immédiatement ! Je vire Phun loin de moi et me précipite aux toilettes.

     

     « -  Blouah !

     - Eh, t'es en train de vomir ?T'es vraiment une mauviette »

     

    Je distingue la voix moqueuse de Phun pas si loin de mon oreille mais je ne suis pas d'humeur à me battre avec lui car je sens bien que gerber est la priorité là maintenant. Je l'entends ricaner avant de sentir une main ferme dans mon dos.

     

     «  - Vomis tout ce que t'as avalé, tu te sentiras mieux »

     

    Ouais, facile à dire !

     

    J'ai vraiment envie de me retourner et de l'insulter mais je me sens beaucoup trop nauséeux. J'essaie de me forcer à tout faire ressortir de mon corps, mais je ne vois pas grand chose faire le chemin inverse.

     

     Phun me masse patiemment le dos pendant un long moment.

     

    « Bon, tu vomis ou quoi ? « 

     

     Je suppose qu'il a remarqué que ça fait un bail que je m’agrippe aux toilettes alors que rien ne se passe.

     

     « J'aimerais bien...mais...il n'y a rieeeeeeen ».

     

     Au final, je suis contraint d'accepter l'horrible situation dans laquelle je suis, même si je me sens toujours aussi mal. J'ai conscience que je peux difficilement rester ici, à faire ami-ami avec les cabinets pendant que Phun me grattouille le dos. Je décide de laisser tomber et de laisser Phun m'aider à me redresser et à me remettre au lit. Alors que ma tête continue de jouer les orchestres, je pense subitement que j'ai atteint mes limites.

     

     « Blouaaaaaaaaaaah ».

     

    Il y a du vomi partout sur nous -_-'

     

    Mes jambes abandonnent le combat à la minute où le premier jet est lancé. Je me retrouve sur le carrelage de la salle de bain au milieu de ma gerbe, complètement exténué.

     

    « Ça va, Noh ?! »

     

     Bizarre que Phun ne m'engueule pas pour ce que je viens de faire. A la place, il s'assied et aide à soutenir mon corps comateux. J'ai l'intention de lui répondre que je vais bien mais au moment d'ouvrir ma bouche...

     

    « Blouaaaaaaaaaaah »

     

     Et voilà le deuxième round, les gens. J'ai perdu tout contrôle. Ce n'est pas une blague ! Là maintenant, je me dis juste que puisque je suis déjà en train de dégobiller, autant aller jusqu'au bout de mon œuvre. Je m'en tape, si je vomis sur quelqu'un. Disons simplement que je choisis d'abuser de la gentillesse de Phun, vu qu'il ne m'insulte même pas. « Blouaaaaaaah ».

     

    « Tout est sorti, c'est bon ? »

     

    Il continue de tapoter mon dos alors que je revomis une ou deux fois encore. Finalement, je sens que mon estomac est désormais vide.

     

     « - Tout sortiiiiiiii

     - T'es sûr ? » mde demande Phun encore une fois avant de m'entraîner dans la baignoire pour me laver.

     

     On pue la gerbe tous les deux. Si je vomissais encore, ce serait d'ailleurs uniquement à cause de l'odeur. Je m'assied sur le rebord de la baignoire, éreinté. Je suis à présent dans le rôle du docile Noh, qui laisse Phun lui ôter son jean et son t-shirt, qui sont tous deux des haillons puants. Je me retoure et laisse l'eau de la douche s'écouler dans mes cheveux. Pendant ce temps, Phun enlève ses propres vêtements, ce qui fait que nous nous retrouvons tous deux en boxer.

     

    «  Qu'est-ce que tu faiiiiiis ? »

     

    On a tendance à virer parano quand on est soûl, je suppose.

     

    « Qu'est-ce que tu veux que je fasse ?! J'essaie de nous nettoyer ! » répond-il en riant avant de diriger la poire sur mon corps pour le rincer. Je replie mes bras sur moi quand je remarque que Phun tente de me savonner.

     

     « - Qu'est-ce que vas me faiiiiiiire ? 

     - Si tu ne veux pas prendre de bain, alors je te traîne par le cul jusqu'au garage et tu coucheras là », me menace-t-il avant que de soulever mes bras et mes jambes pour les couvrir de mousse.

     

     Je ne peux pas réellement débattre là-dessus avec lui vu que je suis d'accord pour dire que je suis vraiment dégueulasse ce soir. Je reste assis et laisse Phun me laver. Je pense alors que c'est étrange de prendre un bain en gardant son boxer, comme on est en train de le faire.

     

    «  - Phun...

     - Quoi ? Déjà sobre ? » me demande-t-il tout en se mettant du shampooing dans ses propres cheveux.

     - Non mais ça va mieux. Tu ne te sens pas bizarre ?

     - Que veux-tu dire ?

     - A porter un boxer sous la douche... »

     

    Même si je réalise que ma question est un peu douteuse, voire tendancieuse, je suis toujours dans un tel brouillard que je n'ai pas de scrupules à la lui poser. Phun arrête immédiatement de se rincer les cheveux.

     

    Il tourne son beau visage vers moi et hausse les sourcils d'un air moqueur.

     

    «  Et ? Tu veux que je l'enlève, ou quoi ? 

     - Tu le gardes quand tu prends ta douche en même temps que tes amis quand tu pars en camping ? »

     

     Je refuse de rendre les armes.

     

     « - Non. Je me mets nu ».

     

    Il rit. Je ne veux pas de cette image dans ma tête.

     

    « Ouais et on est chez toi, là. Est-ce que tu devrais pas faire ce qui est le plus confortable pour toi ? »

     

    Mais pourquoi est-ce que j'ai dit ça, bon sang ? Putain de grande bouche, que j'ai. Je vais me te la claquer une fois que j'aurai recouvré toute ma force.

     

    Je remarque que Phun reste immobile un instant après avoir entendu ce que j'ai dit. Puis, il recommence à rincer ses cheveux. Une fois qu'il a enfin fini, il attrape une serviette pour nous sécher tous les deux.

     

    « - Hé... 

     - Je ne suis pas gentleman à ce point-là....et je ne tiens pas à être un encore plus gros connard que je ne le suis déjà ».

     

    De voir son sourire triste fait se serrer ma poitrine. Je ne peux pas réellement l'expliquer.

     

    Phun me sourit brièvement puis je sens ses lèvres douces sur mon front.

     

    « Cela suffit à me rendre heureux...on devrait dormir un peu. Et ne vomis pas sur mon lit » me dit-il avant de me tirer pour que j'aille me changer.

     

    On dort l'un à côté de l'autre, un traversin entre nous. Mais pourtant, je me sens curieusement en sécurité rien qu'en tenant sa main dans la mienne.

     

    Si c'est le genre de gentillesse que Phun montre envers Aim...alors je ne veux pas qu'elle soit vaine.

     

     °°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°

     

     Ohm s'est royalement payé ma tête quand je me suis pointé au lycée le lundi matin. Il n'arrête pas de parler de la fête et que j'étais tellement beurré que Phun a dû me ramener chez lui et toutes les conneries que j'ai faites. Bonjour humiliation !

     

     « Il agissait comme une merde quand il était bourré. Genre qu'il allait botter le cul de quiconque viendrait l'emmerder ».

     

    Et il continue. C'est, je pense, la troisième fois ce matin qu'il essaie de s'assurer que je vais bien mourir de honte après qu'il en aura parlé à tout le monde.

     

    « Sérieux ? Tu parles de notre Noh, là ?! » demande Palm d'une voix aiguë.

     

    Et pourquoi pas ?! Quelqu'un comme moi n'a pas le droit de se comporter en parfait connard ou quoi ?!

     

     « Oui, ce Noh-là. On savait déjà que c'était un mec bizarre mais alors quand il est soûl, c'est un vrai déchet. Phun a été assez sympa pour finir la dernière bouteille lui-même mais ce bâtard lui en a mis une à cause de ça. Le mec était tellement abasourdi, tout le monde s'est payé une barre. C'était la honte, putain ! Ah ah ah ! »

     

    Nom de dieu, j'ai vraiment fait ça ?!

     

    « - Attends, il en a mis une à Phun Phumipat ? Le secrétaire du Conseil des étudiants ?!

     - Ouaiiiiiis ! Je n'en croyais pas mes yeux. De la violence conjugale, maintenant. Phun a trop peur de sa bonne femme »

     

      Connard ! Je suppose que je ne peux plus rester silencieux, là, c'est ça ?

     

     J'ouvre la bouche pour insulter Ohm quand je remarque le regard paniqué de Palm.

     

    « Depuis quand toi et Phun avez ce genre de relation ? »

     

     Smack !

     

     Je finis par lui mettre une tape sur le crâne pour ne pas écouter ce qu'on lui dit correctement. Bon sang.

     

    Ohm part dans un grand rire (il y a échappé, lui) avant d'attirer l'attention de Palm pour continuer à raconter l'histoire. Même si Palm a mal, il n'a toujours pas retenu la leçon. Il s'intéresse bien trop aux choses merdiques que j'aurais soi-disant faites samedi.

     

    Pour être honnête, je suis également un peu curieux vis-à-vis de ça. (Ohm dit-il la vérité ou l'empire-t-il?). Mais plus je l'écoute, plus je réalise que je ne suis pas tant curieux que ça non plus

     

    T __ T Je me suis vraiment comporté comme un gros con. Je gueulais comme un veau et j'ai fait un scandale. J'ai été ignoble avec le personnel. J'ai renversé de l'alcool partout. Je m'en suis physiquement pris à mes amis. Je me rappelle aussi avoir fait tomber mon portable trois fois. C'est arrivé au point que mes amis ont décidé que je serais beaucoup mieux à la maison, mais je refusais de partir. Ohm dit qu'il a fallu au moins dix mecs pour me mettre dans le taxi et pour que Phun (malheureusement pour lui) puisse être celui qui allait couper court à ce bordel.

     

    Mais alors pourquoi Phun ne m'a-t-il pas dit que j'avais été odieux ?! T ___ T Il faut vraiment qu'il arrête de jouer les grands seigneurs ! Argh !

     

     « - Ah merde, y'a eu ça, aussi. Noh était tellement soûl qu'il se comportait comme un gros dur, okay ? A un moment, il a voulu amener ses miches quelque part mais Phun ne l'a pas laissé faire, et le tirait en arrière. Noh n'était pas d'accord et a voulu envoyé Phun dans le décor, mais il a perdu l'équilibre. Heureusement, Phun a été rapide pour le rattraper. Putain, c'était comme une scène de ce genre de roman où le mec porte la fille dans ses bras parce qu'elle était sur le point de s'évanouir ».

     - Que c'est romantique !! »

     

    Peut-être que tu devrais juste écouter en silence plutôt que donner ton opinion, Palm.

     

     «  - Ouais, romantique mon cul. La fille a fini par en foutre une au mec et ils se sont tous les deux retrouvés par terre, dans notre version à nous. On était pétés de rire ! »

     

    Aaaaaaaaaaaah ! J'aimerais pouvoir disparaître, juste là maintenant !

     

    Ohm et Palm rigolent avant de poursuivre leurs commentaires.

     

    « Si je ne savais pas qu'ils ont tous les deux des petites amies, j'aurais été persuadé que j'étais en train de contempler un couple marié en train de se chamailler ».

     

     Okay, au moins il se souvient que j'ai une petite amie...

     

    J'arrête de les écouter après cette dernière sortie. (Ça devenait longuet). Maintenant, je me demande comment va Phun. Je n'ai pas pris la peine de regarder s'il avait des bleus quand je l'ai vu. Je suppose que j'étais définitivement trop bourré.

     

    « Et alors, est-ce que Phun va bien ? On t'a regardé le battre. Il n'est pas trop amoché, hein ? »

     

    Ohm me pose la question justement au moment où je me l'étais formulée à moi-même.

     

     « - Sais pas.

     - Tu n'as rien vu du tout sous la douche ?

     - J'étais ivre. J'étais dans les vapes. Je ne voyais pas clairement.

     - ... "

      

    Attendez. Est-ce qu'on ne vient pas juste de me piéger pour me faire avouer quelque chose ?

     

    «  PUTAIN DE MERDE, NOH ET PHUN ONT PRIS UNE DOUCHE ENSEMBLE ! »

     

     Eeeeeeh merde ! Ohm gueule, en plus, tellement que tout le monde dans la classe s'amène vers nous.

     

    Putain ! Ce n'est pas vrai !

     

    « Eh, connard ! On avait tous les deux nos boxers ! »

     

    Je sors cette excuse pour sauver mon cul mais Rodkeng (qui a couru nous rejoindre) me pointe du doigt comme s'il m'accusait de quelque chose.

     

     «  - S'il n'y avait pas quelque chose de bizarre entre vous, vous auriez pris cette douche nus comme deux mecs normaux. Mais il fallait que vous gardiez vos boxers, comme si vous aviez besoin qu'il y ait un truc pour vous retenir de faire quelque chose !

     - Whoooooo ! »

     

    Je déteste vraiment ces cons. Pourquoi ont-ils toujours besoin d'agir comme une chorale ? (Connards!) Pourquoi est-ce qu'ils s'enflamment dès qu'il s'agit de moi ?

     

    Je n'ai plus la force de me battre avec eux, de toute façon.

     

     Pendant que tout le monde s'amuse à se foutre de moi...

     

    «  Qu'est-ce qu'il se passe, les mecs ? Vou faites beaucoup de bruit ».

     

    Putain. Avec toutes les occasions de se pointer qu'il y a dans une journée, pourquoi faut-il que ce soit justement celle-ci qu'il ait choisie ?

     

    Je me retourne pour tomber sur Phun, l'autre partie dans cette querelle. Il se tient là, debout, inconscient de ce qui se trame. Personnellement, j'ai l'impression de voir un fantôme.

     

     « Whoooooooooooo ! »

     

     Et les voilà qui recommencent. Vous savez quoi ? Allez trouver une ou deux colombes à libérer de sa captivité et n'oubliez pas de jeter du riz au passage.

     

     « Souhaitons leur beaucoup de plaisir pour leur lune de mieeeeeeeeel »

     

    Rodkeng et Keng me poussent vers Phun. (Où sont mes putains de colombe ?! Et le riz ?! Vous m'envoyez déjà en lune de miel ? Putain!). On dirait que Phun ne comprend pas vraiment ce qu'il se passe, mais il sourit quand même. La bizarrerie de mes amis l'amuse beaucoup. Ça ne fait que rendre les choses plus difficiles pour moi -_-'

     

    Tu pourrais arrêter d'être à côté de la plaque comme ça ?

     

    « Ça vous dérange si j'emprunte la mariée pour un moment ? Je la ramène bientôt ».

     

    Bon sang, est-ce que tu réalises seulement ce que tu dis ? !

     

    Mes amis beuglent pendant qu'on m'entraîne dehors. Je vous dis pas, ma vie.

     

    « Qu'est-ce que tes amis faisaient ? Ça avait l'air amusant » me demande Phun, l'air excité, une fois sortis.

     

    Je ne sais pas quoi lui répondre.

     

     « Hum... »

     

    Je préfère lui demander ce à propos de quoi je me pose réellement des questions.

     

    « Est-ce que je t'ai vraiment battu ? Cette nuit à Lumphini Park ? »

     

     Il semble qu'il ne s'attendait pas à ça car il reste coi un moment.

     

    « - Pourquoi ?

     - Ohm dit que je me suis vraiment comporté comme un con quand j'étais bourré. Que je t'ai battu et tout. Merde, je suis vraiment désolééé ! J'étais soûl ! Je ne voulais pas faire tout çaaa ! »

     

     Je m'excuse platement car je me sens vraiment coupable. Pourquoi a-t-il été tellement sympa après ça, d'ailleurs ? Pourquoi a-t-il enduré tout ça ? Il ne s'est même pas plaint une fois.

     

    Je peux l'entendre ricaner et je perçois un soupçon de sournoiserie dans sa voix.

     

    « - Oui, ça m'a vraiment fait mal. Tu étais très violent. Je me demandais justement comment te le faire payer

     - Putain, je suis désolé ! Frappe-moi ! Vas-y ! Botte-moi le cul ! Je te laisserai faire tout ce que tu veux aujourd'hui ! 

     - Baisse la tête et ferme les yeux ».

     

     Bon dieu, il se prend pour un seigneur ou quoi ? Peu importe. Je ne peux pas dire non alors que je viens de lui permettre de faire ce qu'il voulait. J'espère qu'il ne cognera pas trop fort, quand même

     

    Y _ Y

     

     Je garde la tête baissée et mes yeux fermement clos pendant que je me demande ce que Phun va faire. Est-ce qu'il va me frapper sur le crâne? M'attraper l'oreille ? Me mettre un coup de coude ? Me mettre un coup de genoux dans le ventre ? N'importe quoi ? Lequel fait le plus mal, d'ailleurs ? Serai-je capable d'encaisser ce qu'il s'apprête à faire ?

     

     Je continue à retourner la question dans ma tête. Finalement, je sens un truc froid autour de mon cou.

     

     « Tu peux ouvrir les yeux maintenant ».

     

    Je le fais et vois les plaques en argent, le souvenir du tournoi de foot, pendre à mon cou.

     

      " Oh ! J'avais presque oublié ! Il en restait, alors ?! »

     

     Phun sourit en remuant la tête.

     

     « - Nan, il y avait une tonne d'étudiants qui bossaient, cette année. Et des anciens, aussi. J'ai juste pu en avoir un pendant que je nourrissais Earn.

     - Un seul ?

     - Ouais.

     - Et le tien ?

     - Ne t'inquiète pas pour ça. Celui-là est à toi ».

     

     Est-ce qu'il va arrêter de jouer les gentlemen ? Ça me stresse littéralement.

     

     «  Très drôle. Tu l'as eu, tu devrais le garder », lui dis-je sur le ton de la réprimande alors que j'essaie d'ôter le collier. Phun agrippe immédiatement mes mains et les tient fermement. Il me regarde étrangement, comme s'il était vraiment agacé par mon attitude.

     

     « Je...te le donne. Pourquoi es-tu comme ça... ? »

     

     Okay, j'oublie que je ne devrais pas me comporter comme ça. Phun remarque que j'ai cessé de vouloir l'enlever et lâche mes mains.

     

    « Tu as travaillé dur, toi aussi, tu en voulais sans doute un. En plus, les mecs le donnent généralement à leur petite amie ».

     

     Je n'ai aucun idée de la raison pour laquelle j'ai bien pu ajouter ça, mais c'est vrai. Les souvenirs d'événements importants comme celui-là sont précieux. Donc, si vous les offrez à quelqu'un, c'est généralement à la personne avec qui vous sortez. Phun pousse un long soupir, tellement long que je peux sentir son souffle.

     

    « Aim reçoit un tas de trucs de moi, déjà...laisse-moi juste te donner quelque chose, pour une fois. Ne refuse pas ».

     

     Qu'est-ce que je suis supposé répondre à ça ?

     

     On reste là, à se regarder en silence. Même si j'ai plein de pensées défilant en boucle dans ma tête. Je sais que c'est le cas de Phun, aussi. Ses yeux essaient de me dire quelque chose.

     

    « Hé Noh ! Oh, Phun ? Tu t'es perdu ? ».

     

     On sursaute tous les deux en entendant la voix d'Earn nous saluer et taquiner Phun. Ce dernier se retourne pour lui sourire.

     

     « Tu t'es perdu aussi ? » le taquine-t-il en retour.

     

    Earn ricane.

     

    « Tes bleus guérissent bien ? »

     

    Crétin ! Est-ce que tous ces gens vont s'arrêter de parler des merdes que j'ai faites à Lumphini Park ?!

     

     Phun rit et me jette un œil moqueur.

     

    « Je songeais à en parler à mon père ».

     

    Fais ce que tu veux, pleurnichard. Si je ne l'avais pas déjà cogné plusieurs fois samedi, je le ferais là maintenant.

     

     « Oui, tu devrais. Vous avez fini de discuter ? Il faut que je parle à Noh de quelque chose ».

     

    Donc, ces bâtards pensent que je suis un employé de Rotiboy (1) si je comprends bien ? Est-ce que j'ai besoin de commencer à distribuer des tickets pour que les gens qui veulent me parler fassent la queue ?

     

    Phun me sourit.

     

     « Oui, on a fini. Au fait, n'oublie pas pour vendredi, Noh », répond-il en me rappelant le week-end à Hua Hin. J'avais quasiment oublié, à vrai dire. Ean semble confus, alors qu'il regarde Phun s'éloigner.

     

     « - Qu'est-ce qu'il se passe vendredi ?

     - Rien. De quoi tu voulais me parler ? »

     

    Je change rapidement de sujet vu qu'apparemment, il veut discuter de quelque chose avec moi.

     

     «  Ah oui. Je suis venu te donner ça. Comme promis ».

     

     Earn me fait un grand sourire et me montre un lot de plaques militaires.

     

    Mais...qu'est-ce que c'est que ce bordel ?!

     

     « Oh, j'en porte un en ce moment ! » lui dis-je en pointant mon cou du doigt.

     

     Il n'a même pas remarqué, ou quoi ? -_-'

     

     Earn a l'air tellement décontenancé, on dirait qu'il a vu un fantôme.

     

    « Où l'as-tu eu ?! Personne dans l'équipe technique n'a pu en récupérer un, d'après ce qu'on m'a dit ! »

     

    On dirait que je suis donc le seul membre qui pourrait en avoir carrément deux ? Ah ah ah.

     

     « Phun vient juste de me le donner. Désolé, mec. Je suppose que ça te brise le cœur, mon frère ».

     

     Je plaisante en tapotant son épaule, mais je remarque que son expression devient grave.

     

    « Oui...ce doit être vrai ».

     

     Qu'est-ce qu'il marmonne ? Je n'ai pas entendu.

     

    « - Hein ?

     - Rien, rien. Je ferais mieux de retourner en cours. Mon groupe participe au Live contest, au fait. Je passerai déposer notre formulaire de candidature plus tard ».

     

     Earn change de sujet pour parler du Live constest que mon club accueille juste avant Noël. C'est une compétition où le meilleur gagne le droit de jouer pendant la réception de Noël et aussi une opportunité de participer au tournoi RAD à Wat Ratchbophit (2).

     

    Je fais un sourire amical à Earn.

     

    « Ouais, bien sûr. Dépose-le au club, okay ? Mais s itu es trop occupé, laisse-le à ma salle de classe », lui dis-je. Il me répond simplement par un bref sourire avant de me dire au revoir et de retourner en cours.

     

    Qu'est-ce qu'il lui prend ? Pourquoi a-t-il l'air aussi déprimé à cause de cette histoire ?

     

    Peu importe.

     

    C'est déjà vendredi que je pars pour Hua Hin ?

     

     

    A suivre...

     

     

     

    (1) A l'époque de la publication du roman, Rotiby était une chaîne de pâtisseries malaise implantée en Thaïlande. Elle était très populaire et les gens faisaient la queue pour y acheter des gâteaux. Depuis, le succès s'est tari et elle a a quitté la Thaïlande.

     

    (2) Il s'agirait d'une compétition musicale destinée à réunir des fonds pour la luttre contre le trafic de drogue.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     


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