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    Chapitre 25 : Je ne pouvais pas

     

     

     « Est-il...Je veux dire, Phun. Est-il toujours avec sa copine ? »

     

    La question de Golf me laisse un peu perplexe, pour diverses raisons. Pourquoi me parle-t-il de ça subitement ? Et surtout, est-ce qu'il ne devrait pas demander directement à Phun ? Pourquoi passer par son ami plutôt ?

     

    « Avec Aim ? Ben, oui. On a mangé ensemble, un peu plus tôt dans la soirée ».

     

    Tout à coup, comme je réponds à Golf, je sens un étrange accès de douleur dans ma poitrine. Il faut que je continue de me répéter encore et encore que c'est une bonne chose, qu'ils n'aient pas rompu.

     

    Je prends une longue respiration, tout en avisant l'expression confuse sur le visage de Golf. On dirait que ça ne le ravit pas, que son ami ait une vie amoureuse florissante.

     

    Qu'est-ce qu'il a, ce mec ?

     

    « Il y a un problème ? »

     

    Golf ne répond toujours pas, même après que j'ai répété ma question. Il remue la tête et prend une nouvelle bouffée de sa cigarette avant de me tendre son XDA O2.

     

    Mais qu'est-ce qu'il a ?

     

    « Hé, tu me montres ça pour te la péter ou quoi ? Peu importe, je commence à en avoir marre de traîner avec des mecs pété de thunes », dis-je pour faire une blague, même si je l'insulte en même temps.

     

    Il me met une tape sur la tête. Bah quoi, c'est pas ce qu'il essaie de faire, alors ? ^^'

     

    « Abruti, je ne te le montre pas pour me la péter. Regarde les vidéos ».

     

    Bon dieu, je ne sais pas pourquoi il est si sérieux, tout à coup. Je jette un coup d’œil à son visage, qui a maintenant une expression solennelle puis je saisis le téléphone dernier cri pour regarder.

     

    Et d'ailleurs, comment ça s'utilise, ce truc, au fait ? Sur quel bouton je suis censé appuyer ?

     

    « Comment ça marche ? »

     

    Je pose la question à haute voix tout en sélectionnant des applications au hasard avec le stylet mais Golf ne me prête même pas attention. (Ne te plains pas si je bousille ta merde). Il s'éloigne pour continuer à fumer dans le coin. Je suppose qu'il craint que la fumée ne me dérange.

     

    Finalement, j'arrive maladroitement à accéder aux vidéos.

     

    Puuuuuuuutain ! Il y a plein de porno là-dessus !

     

    « Purée, t'es un peu pervers, quand même. Envoie-moi quelques vidéos plus tard, hé hé hé ».

     

    Je lui crie cela pour le faire rire mais il revient vers moi en courant dès qu'il m'entend. Son air sombre me déconcerte. Avec l'une de ses mains, il couvre l'écran, puis il me regarde.

     

    « Jette un œil à ça. Et dis-moi ce que t'as vu », me dit-il avant de retourner fumer plus loin.

     

    Et donc, il va juste laisser le pauvre Noh dans le flou artistique, comme ça ?

     

    Le seul moyen de savoir ce qu'il veut dire, c'est de regarder la vidéo qu'il a sélectionnée.

     

    J'appuie sur « play ». Il semble que ce soit une vidéo amateur vu que je vois le visage d'un mec obstruer tout l'écran alors qu'il adapte l'angle de la vidéo, avant de se diriger vers un lit. Je ne me sens pas très à l'aise parce que je ne sais pas si ce que je regarde est du porno ou non.

     

    Et j'avais raison -_-' Le téléphone diffuse un clip porno. Maintenant, je vois un mec et une fille se caresser sur le lit, complètement nus. (Je pense qu'ils sont dans une chambre d'hôtel). La caméra est placée un peu trop bas, je n'arrive pas à voir clairement le visage de la fille. (J'ai déjà vu celui du mec quand il l'installait).

     

    Purée, cette fille a vraiment un joli corps. Sa peau est claire et lisse. Ses seins sont pile de la bonne taille, ni trop petits, ni trop gros. Je commence à m'inquiéter, je ne sais pas si je devrais continuer à regarder ou pas. Et si j'ai une réaction là maintenant ? Ça ne le ferait pas. Qu'est-ce qu'il essaie de faire avec ça, Golf, putain ? Est-ce qu'il s'amuse avec moi ?

     

    Juste au moment où je m'apprêtais à tourner la tête pour engueuler le propriétaire du portable, je perds toute capacité à parler quand je réalise ce qu'il se passe à l'écran. Maintenant, je suis plus que certain que ce clip ne m'excitera jamais.

     

    J'ouvre grand mes yeux pour voir plus clairement, juste pour être sûr. Le couple s'écroule sur le lit et je peux voir le visage de la fille.

     

    C'est un visage parfait, magnifique, qui m'est très familier. Je reconnais ces yeux, que je vois souvent. Elle les plisse, comme si elle était envahie par le désir. Je vois un grand nez et des lèvres rouges. Elle se les mord lorsque l'excitation la gagne un peu plus.

     

    Je n'ai jamais vu ce visage dans un tel moment, avant. Mais si je me fie à mon intuition, tous mes sens me disent que cette fille, c'est...

     

    ...Aim, la copine de Phun. C'est définitivement la copine de mon ami.

     

    Beaucoup de pensées défilent dans ma tête alors que je fixe l'écran, témoin de tout ce qu'il s'y passe. Je ne peux pas regarder ça plus longtemps. J'appuie sur « pause » et détourne les yeux même si le clip continue encore longtemps après ça.

     

    On dirait que Golf a réalisé que j'avais enfin compris ce qu'il voulait me dire.Il revient vers moi et me tape gentiment l'épaule, tout en reprenant son portable.

     

    « - Je n'ai pas pu le finir non plus. Je me sentais vraiment mal, putain.

     - Qu'est-ce qu ça veut dire ? »

     

    Je m'assieds sur le trottoir, complètement abattu. Jamais je n'aurais imaginé que j'allais devoir faire face à un truc comme ça. Golf s'accroupit à mes côtés.

     

    « Le mec, dans le clip, est un ami. Euh, dans mon lycée... » commence-t-il.

     « - Aim est très connue. Presque tous mes amis ont déjà couché avec elle.

     - Comment c'est même possible... ?

     - Et ils n'ont pas besoin de dépenser un kopeck », poursuit-il en tirant une bouffée de sa cigarette.

     

    Je ne sais pas ce que Golf veut dire par là, mais je hais ce qu'il raconte.

     

    «-  Peut-être que c'est un malentendu. Tu détruis sa réputation, là

     - J'ai...eu affaire à elle personnellement, Noh ».

     

    Je tourne rapidement la tête vers lui.

     

    « - Comment ça, « affaire à elle » ?

     - J'étais au Jet l'autre jour. Je suis tombé sur Aim, elle traînait avec certains de mes amis.

     - Et alors ?

     - Elle était un peu bourrée et elle s'est quasiment jetée sur moi. Je suppose qu'elle ne savait pas dans quel lycée j'étais, avant. J'ai pensé qu'elle avait rompu avec Phun.

     - …

     - On a même été jusqu'à l'hôtel, mais je n'ai pas pu le faire. Peu importe à quel point elle était bien foutue, j'étais habituée à la voir dans d'autres contextes, donc ça me faisait bizarre. J'y arrivais pas. J'ai même pas bandé, mec. Putain, j'ai jeté mon fric par les fenêtres, en payant cette chambre d'hôtel, hé hé ».

     

    Je me force à rire avec Golf comme il plaisantait probablement avec son histoire d'argent jeté par les fenêtres. Je sais qu'un type qui aime ses amis comme Golf aime les siens ne pourrait jamais faire un truc comme ça, même si lui et Phun ne sont pas très proches.

     

    Je ne sais pas quoi ajouter. Tout est confus dans ma tête. Mais les preuves sont sous mon nez, sous la forme d'une vidéo. Golf m'a même raconté son expérience personnelle. Mais je suis trop effrayé, trop effrayé pour le croire. Mon cerveau me dit qu'il doit y avoir une erreur quelque part. Je souhaite désespérément que ce soit juste un malentendu.

     

    Golf remarque que j'ai du mal à accepter les faits et tend la main pour me tapoter légèrement l'épaule.

     

    « - Juste...dis-le à Phun. Je me sens vraiment mal pour lui, mec .

     - Comment... ? Je ne sais même pas comment je pourrais lui annoncer un truc pareil ».

     

    Je serre les poings. Golf opine de la tête pour me signifier qu'il comprend.

     

    Nous restons assis en silence pendant un long moment avant que Golf ne me fasse de nouveau une tape sur l'épaule pour m'inviter à retourner à l'intérieur.

     

    Je suis complètement paumé, à ce stade.

     

     °°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°

     

    Une fois retourné à ma place, tout ce que je voulais, c'était boire.

     

    « Yo, qu'est-ce que t'as fait à Noh, putain ?! Pourquoi est-ce qu'il se comporte comme un poivrot ? ! »

     

    La voix d'Earn hurlant aux oreilles de Golf me parvient. Je suppose que c'est en rapport avec le fait depuis que je suis revenu à l'intérieur avec Golf, mon verre n'a jamais été vide une fois. Mais qui a dit que j'étais soûl, franchement ? Je ne suis pas soûl du tout !

     

    J'ai juste l'impression que la gravité s'exerce avec plus de force depuis quelques temps. Pourquoi ma tête est-elle tellement attirée par le plancher ?

     

    « Un auuuuuuuuutre »

     

    Même si Earn est constamment sur mon dos, j'ai toujours Ohm en réserve. Il continue de me servir des cocktails au point que j'ai oublié à combien j'en suis déjà. Ohm semble bien beurré lui-même, car chaque verre est un peu plus fort que le précédent.

     

    Je soulève mes lourdes paupières pour constater que mes amis ont commandé une autre bouteille de Black Label. Les choses deviennent confuses, je suppose que c'est parce que je commence à y voir flou. Je distingue les contours de la silhouette de Keng qui me tape sur la tête et dit à tout le monde : « ce bâtard est complètement cuit ».

     

    Quoi ?! Je ne suis pas cuit !

     

    Je commence à m'énerver mais en fait je m'en fous de savoir qui dit quoi. La seule chose que je sais, c'est que ma tête est en train de me tuer. Je ne suis pas d'humeur à me disputer avec qui que ce soit. Je garde la tête baissée et je sens que le jarret de porc et le saumon sont sur le point de remonter dans ma gorge. Je décide qu'il serait peut-être mieux de relever la tête, finalement.

     

    Je fixe la plafond et me bats contre les néons du restaurant. Mes sourcils sont si froncés que j'ai l'impression que ce sont deux aimants attirés l'un par l'autre. Peu importe combien j'essaie de les séparer, j'en suis incapable.

     

    Toutes les pensées qui sont dans mon esprit entrent en conflit. Je suis si perdu. Je ne sais pas quoi faire du tout.

     

    J'ai vu ces images seulement un court instant mais leur réalité me frappe avec clarté. Mes pensées disent à mes sens quel genre de femme Aim est. Toutes ces choses, en plus de la voix de Golf qui se répète lourdement dans mon crâne, ressassent encore et encore ce qu'il s'est passé. Des choses dont Phun n'a pas idée.

     

    Je pense à son sourire. Le sourire qu'il me fait, qu'il fait à Aim, qu'il fait à tout le monde. Ce magnifique et éternel sourire qu'il a. Je ne pardonnerai jamais la personne qui détruira ce sourire. Je ne pardonnerai jamais la personne qui n'est pas capable de voir quel trésor Phun est. Surtout pas celle qui a clairement établi que tout l'amour et les bonnes intentions de Phun ne servaient à rien.

     

    Ça me fait tellement plus mal que la nuit où nous avons dû nous dire adieu.

     

    Je serre les poings. Mes ongles rentrent dans ma chair. La seule chose à laquelle j'ai pense, c'est combien Phun sera dévasté. Mes entrailles se compressent tellement que ça me fait mal. Je n'aurais jamais dû l'apprendre du tout.

     

    Parce que je ne sais pas si je peux faire quoi que ce soit pour Phun. Ou est-ce qu'il faut juste que je laisse les choses comme elles sont ?

     

    Il n'y a qu'un mot dans ma tête : pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ?

     

    Mes amis continuent de rire et de faire la fête sans se lasser. Je n'ai pas assez d'énergie pour rire avec eux. Ce n'es pas parce que je suis soûl mais plutôt parce que mes propres pensées m'épuisent. Je sais que je ne peux pas laisser cette énorme erreur continuer. Je suis trop effrayé pour déterminer si ce dont j'ai fait l'expérience ce soir est bien la vérité ou juste un rêve. Peut-être que ce n'est pas tout ce qu'il y a à savoir dans cette histoire. Peut-être Aim a-t-elle un raison d'agir comme elle le fait (mais je ne peux penser à aucune). Ou peut-être que ce n'était pas Aim du tout.

     

    Je crie contre moi-même à l'intérieur de ma tête, me répétant de ne pas croire tout ce qu'on me dit. Parce que, à la fin, Aim sera celle qui aura le plus perdu, et mon ami celui qui aura le plus souffert.

     

    Je...ne veux pas y croire...

     

    « Noh, qu'est-ce qu'il se passe ? »

     

     Une voix profonde et familière interrompt le fil de mes pensées. J'ouvre les yeux piur regarder la personne qui se tient à mes côtés, avec un sourire idiot.

     

    « Qui l'a laissé boire comme ça, merde ! Il est tout rouge », dit Phun en se tournant vers mes amis.

     

    « Ouais, ouais. Tu n'as qu'à t'en occuper. Ton petit ami ne tient vraiment pas l'alcool », répond Rodkeng en ricanant. Ces bâtards. S'il me restait la moindre force, je vous botterais le cul à tous. Mais je n'en ai plus. Pas ce soir.

     

    Je suis toujours sur ma chaise, et observe Phun qui s'assied sur mon accoudoir.

     

    Il passe une bonne soirée à discuter avec nos amis. De temps en temps, j'entends son rire. Néanmoins, il se tourne occasionnellement vers moi pour vérifier si je suis toujours vivant.

     

    « Noh ! Un autre, un autre ! »

     

    Quoi qu'il en soit, Ohm continue à me servir des shooter et je ne les décline pas du tout. Je tends la main pour prendre le verre mais quelqu'un la bloque : « Il est vraiment mort, Ohm. Je pense qu'il en a eu assez ». Il n'y a qu'une personne pour s'opposer à ma volonté.

     

    « Laisse tomber, Phun ! On a commandé cette bouteille donc Noh a besoin de prendre ses responsabilités vis-à-vis d'elle ! »

     

    Le ton d'Ohm signifie qu'il ne cédera pas facilement. Je ne vois pas vraiment quel genre de tête Phun fait mais je vois l'ombtre de sa main prendre le verre pour lui-même.

     

    « Tu n'as qu'à me les donner, alors. C'est moi qui les boirai ».

     

    Je tends instinctivement le bras pour attraper le sien quand je l'entends dire ça.

     

    « - Non, Phun. Ne t'en occupe pas, c'est à moi de me bourrer la gueule.

     - Je ne serai pas bourré. Je ne suis pas une mauviette », me répond-il avec un soupçon de malice dans la voix qui me donne envie de lui refiler un coup de pied.

     

    Malheureusement, je ne suis pas en état de le faire, pour l'heure. Il pousse mon front de son doigt ce qui me fait basculer en arrière parce que je n'ai pas la moindre résistance.

     

    « T'es trop ivre, pas moyen de te laisser continuer à boire ».

     

    Il me caresse gentiment le front avec sa main. Je ne peux m'empêcher de sourire. J'agrippe sa main avec des sentiments confus.

     

    « - Phun...

     -Oui, quoi ?

     - Peu importe ce qui arrive...Je serait toujours là pour toi, d'accord ? »

     

     

     

    A suivre....

     


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    Chapitre 26 : Gentillesse

     

     

     

    Mon putain de crâne est en train de me tuer.

     

    C'est la seule pensée qui anime mon esprit. Ma migraine empire, j'ai l'impression que je suis sur le point d'en crever. Je resterais bien couché ici si je pouvais mais quelqu'un me traîne quelque part, qui c'est bordel ?

     

    « Laisse...moi...j'ai envie de dormiiiiiir

     - Tu dormiras bientôt ».

     

    Je reconnais cette voix illico.

     

    « Phun...où...est-ce...que...tu m'emmèèèèènes? »

     

    Ça prend tellement d'énergie de sortir chaque mot, putain !

     

    « Au lit, pour que tu puisses dormir. Arrête de te débattre, s'il-te-plaît, t'es déjà assez lourd comme ça », me répond Phun alors qu'il place son bras autour de mes épaules.

     

    J'ai des vertiges et je me sens un peu nauséeux, comme si quelque chose s'apprêtait à remonter dans ma gorge.

     

    « On y est presque », dit-il.

     

    Entendre cela me fait me sentir un peu mieux. On fait tant bien que mal notre chemin jusqu'à l'étage, trébuchant de temps à autre. J'ai toujours l'impression qu'un truc cogne dans ma tête au moment où Phun ouvre une porte. J'ouvre mes yeux pour constater qu'on est dans...sa chambre. Je referme rapidement les yeux de nouveau.

     

     Pourquoi m'a-t-il amené ici, bordel ?! Je veux rentrer à la maison !

     

    « La maison ! Ramène-moi à la maison ! A la maison ! Je veux rentrer à la maisooooon ! »

     

    J'emploie toute la force qu'il me reste à me dégager de sa poigne quand je réalise où nous sommes. Mais en fait, je ne sais pas trop pourquoi je fais tout ce tapage exactement.

     Phun renforce sa prise sur mon bras.

     

    « Ne sois pas si têtu. Tu es complètement pété. Tu veux retourner chez toi pour que ton père t'en mette une, idiot ? ».

     

    Il ajoute quelques jérémiades à propose de je-ne-sais-quoi, le temps que je reprenne mes esprits, je me retrouve le dos contre un matelas confortable. On dirait le paradis. Mais je n'ai toujours pas l'énergie de me repositionner correctement pour bien dormir, cela dit. J'essaie de me déplacer un peu sur le lit, étant donné que je ne suis pas bien installé, et Phun finit par soutenir mon dos pour que je positionne mieux. Ma tête me fait tellement mal que je suis contraint de pousser son épaule pour l'arrêter.

     

    « Ca ira, Noh ? »

     

    Qu'est-ce que je suis censé lui dire ? Ma tête peut exploser à tout moment. Je n'ai même pas assez de force pour prononcer un mot en réponse.

     

    La migraine va de mal en pis, alors je me force à ouvrir les yeux. La première chose que je vois, c'est le visage de Phun Phumipat, assez proche pour que je puisse sentir son souffle. A la seconde où j'aperçois ces yeux noirs paniqués en train de me dévisager, j'oublie complètement ma migraine. Il y a dans les yeux de Phun une lueur si intense que vous ne pouvez pas vous en décrocher. C'est comme s'ils vous suppliaient de ne pas partir. Je fixe ces yeux brillants qui se rapprochent de plus en plus, lentement. Nos visages sont si proches qu'on peut parfaitement se détailler. Je sens la main de Phun caresser tendrement ma joue alors que nos lèvres se touchent.

     

    Mais...

     

    « Eurk ! Blouah ! »

     

    Urgence ! Urgence ! Évacuez les locaux immédiatement ! Je vire Phun loin de moi et me précipite aux toilettes.

     

     « -  Blouah !

     - Eh, t'es en train de vomir ?T'es vraiment une mauviette »

     

    Je distingue la voix moqueuse de Phun pas si loin de mon oreille mais je ne suis pas d'humeur à me battre avec lui car je sens bien que gerber est la priorité là maintenant. Je l'entends ricaner avant de sentir une main ferme dans mon dos.

     

     «  - Vomis tout ce que t'as avalé, tu te sentiras mieux »

     

    Ouais, facile à dire !

     

    J'ai vraiment envie de me retourner et de l'insulter mais je me sens beaucoup trop nauséeux. J'essaie de me forcer à tout faire ressortir de mon corps, mais je ne vois pas grand chose faire le chemin inverse.

     

     Phun me masse patiemment le dos pendant un long moment.

     

    « Bon, tu vomis ou quoi ? « 

     

     Je suppose qu'il a remarqué que ça fait un bail que je m’agrippe aux toilettes alors que rien ne se passe.

     

     « J'aimerais bien...mais...il n'y a rieeeeeeen ».

     

     Au final, je suis contraint d'accepter l'horrible situation dans laquelle je suis, même si je me sens toujours aussi mal. J'ai conscience que je peux difficilement rester ici, à faire ami-ami avec les cabinets pendant que Phun me grattouille le dos. Je décide de laisser tomber et de laisser Phun m'aider à me redresser et à me remettre au lit. Alors que ma tête continue de jouer les orchestres, je pense subitement que j'ai atteint mes limites.

     

     « Blouaaaaaaaaaaah ».

     

    Il y a du vomi partout sur nous -_-'

     

    Mes jambes abandonnent le combat à la minute où le premier jet est lancé. Je me retrouve sur le carrelage de la salle de bain au milieu de ma gerbe, complètement exténué.

     

    « Ça va, Noh ?! »

     

     Bizarre que Phun ne m'engueule pas pour ce que je viens de faire. A la place, il s'assied et aide à soutenir mon corps comateux. J'ai l'intention de lui répondre que je vais bien mais au moment d'ouvrir ma bouche...

     

    « Blouaaaaaaaaaaah »

     

     Et voilà le deuxième round, les gens. J'ai perdu tout contrôle. Ce n'est pas une blague ! Là maintenant, je me dis juste que puisque je suis déjà en train de dégobiller, autant aller jusqu'au bout de mon œuvre. Je m'en tape, si je vomis sur quelqu'un. Disons simplement que je choisis d'abuser de la gentillesse de Phun, vu qu'il ne m'insulte même pas. « Blouaaaaaaah ».

     

    « Tout est sorti, c'est bon ? »

     

    Il continue de tapoter mon dos alors que je revomis une ou deux fois encore. Finalement, je sens que mon estomac est désormais vide.

     

     « - Tout sortiiiiiiii

     - T'es sûr ? » mde demande Phun encore une fois avant de m'entraîner dans la baignoire pour me laver.

     

     On pue la gerbe tous les deux. Si je vomissais encore, ce serait d'ailleurs uniquement à cause de l'odeur. Je m'assied sur le rebord de la baignoire, éreinté. Je suis à présent dans le rôle du docile Noh, qui laisse Phun lui ôter son jean et son t-shirt, qui sont tous deux des haillons puants. Je me retoure et laisse l'eau de la douche s'écouler dans mes cheveux. Pendant ce temps, Phun enlève ses propres vêtements, ce qui fait que nous nous retrouvons tous deux en boxer.

     

    «  Qu'est-ce que tu faiiiiiis ? »

     

    On a tendance à virer parano quand on est soûl, je suppose.

     

    « Qu'est-ce que tu veux que je fasse ?! J'essaie de nous nettoyer ! » répond-il en riant avant de diriger la poire sur mon corps pour le rincer. Je replie mes bras sur moi quand je remarque que Phun tente de me savonner.

     

     « - Qu'est-ce que vas me faiiiiiiire ? 

     - Si tu ne veux pas prendre de bain, alors je te traîne par le cul jusqu'au garage et tu coucheras là », me menace-t-il avant que de soulever mes bras et mes jambes pour les couvrir de mousse.

     

     Je ne peux pas réellement débattre là-dessus avec lui vu que je suis d'accord pour dire que je suis vraiment dégueulasse ce soir. Je reste assis et laisse Phun me laver. Je pense alors que c'est étrange de prendre un bain en gardant son boxer, comme on est en train de le faire.

     

    «  - Phun...

     - Quoi ? Déjà sobre ? » me demande-t-il tout en se mettant du shampooing dans ses propres cheveux.

     - Non mais ça va mieux. Tu ne te sens pas bizarre ?

     - Que veux-tu dire ?

     - A porter un boxer sous la douche... »

     

    Même si je réalise que ma question est un peu douteuse, voire tendancieuse, je suis toujours dans un tel brouillard que je n'ai pas de scrupules à la lui poser. Phun arrête immédiatement de se rincer les cheveux.

     

    Il tourne son beau visage vers moi et hausse les sourcils d'un air moqueur.

     

    «  Et ? Tu veux que je l'enlève, ou quoi ? 

     - Tu le gardes quand tu prends ta douche en même temps que tes amis quand tu pars en camping ? »

     

     Je refuse de rendre les armes.

     

     « - Non. Je me mets nu ».

     

    Il rit. Je ne veux pas de cette image dans ma tête.

     

    « Ouais et on est chez toi, là. Est-ce que tu devrais pas faire ce qui est le plus confortable pour toi ? »

     

    Mais pourquoi est-ce que j'ai dit ça, bon sang ? Putain de grande bouche, que j'ai. Je vais me te la claquer une fois que j'aurai recouvré toute ma force.

     

    Je remarque que Phun reste immobile un instant après avoir entendu ce que j'ai dit. Puis, il recommence à rincer ses cheveux. Une fois qu'il a enfin fini, il attrape une serviette pour nous sécher tous les deux.

     

    « - Hé... 

     - Je ne suis pas gentleman à ce point-là....et je ne tiens pas à être un encore plus gros connard que je ne le suis déjà ».

     

    De voir son sourire triste fait se serrer ma poitrine. Je ne peux pas réellement l'expliquer.

     

    Phun me sourit brièvement puis je sens ses lèvres douces sur mon front.

     

    « Cela suffit à me rendre heureux...on devrait dormir un peu. Et ne vomis pas sur mon lit » me dit-il avant de me tirer pour que j'aille me changer.

     

    On dort l'un à côté de l'autre, un traversin entre nous. Mais pourtant, je me sens curieusement en sécurité rien qu'en tenant sa main dans la mienne.

     

    Si c'est le genre de gentillesse que Phun montre envers Aim...alors je ne veux pas qu'elle soit vaine.

     

     °°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°

     

     Ohm s'est royalement payé ma tête quand je me suis pointé au lycée le lundi matin. Il n'arrête pas de parler de la fête et que j'étais tellement beurré que Phun a dû me ramener chez lui et toutes les conneries que j'ai faites. Bonjour humiliation !

     

     « Il agissait comme une merde quand il était bourré. Genre qu'il allait botter le cul de quiconque viendrait l'emmerder ».

     

    Et il continue. C'est, je pense, la troisième fois ce matin qu'il essaie de s'assurer que je vais bien mourir de honte après qu'il en aura parlé à tout le monde.

     

    « Sérieux ? Tu parles de notre Noh, là ?! » demande Palm d'une voix aiguë.

     

    Et pourquoi pas ?! Quelqu'un comme moi n'a pas le droit de se comporter en parfait connard ou quoi ?!

     

     « Oui, ce Noh-là. On savait déjà que c'était un mec bizarre mais alors quand il est soûl, c'est un vrai déchet. Phun a été assez sympa pour finir la dernière bouteille lui-même mais ce bâtard lui en a mis une à cause de ça. Le mec était tellement abasourdi, tout le monde s'est payé une barre. C'était la honte, putain ! Ah ah ah ! »

     

    Nom de dieu, j'ai vraiment fait ça ?!

     

    « - Attends, il en a mis une à Phun Phumipat ? Le secrétaire du Conseil des étudiants ?!

     - Ouaiiiiiis ! Je n'en croyais pas mes yeux. De la violence conjugale, maintenant. Phun a trop peur de sa bonne femme »

     

      Connard ! Je suppose que je ne peux plus rester silencieux, là, c'est ça ?

     

     J'ouvre la bouche pour insulter Ohm quand je remarque le regard paniqué de Palm.

     

    « Depuis quand toi et Phun avez ce genre de relation ? »

     

     Smack !

     

     Je finis par lui mettre une tape sur le crâne pour ne pas écouter ce qu'on lui dit correctement. Bon sang.

     

    Ohm part dans un grand rire (il y a échappé, lui) avant d'attirer l'attention de Palm pour continuer à raconter l'histoire. Même si Palm a mal, il n'a toujours pas retenu la leçon. Il s'intéresse bien trop aux choses merdiques que j'aurais soi-disant faites samedi.

     

    Pour être honnête, je suis également un peu curieux vis-à-vis de ça. (Ohm dit-il la vérité ou l'empire-t-il?). Mais plus je l'écoute, plus je réalise que je ne suis pas tant curieux que ça non plus

     

    T __ T Je me suis vraiment comporté comme un gros con. Je gueulais comme un veau et j'ai fait un scandale. J'ai été ignoble avec le personnel. J'ai renversé de l'alcool partout. Je m'en suis physiquement pris à mes amis. Je me rappelle aussi avoir fait tomber mon portable trois fois. C'est arrivé au point que mes amis ont décidé que je serais beaucoup mieux à la maison, mais je refusais de partir. Ohm dit qu'il a fallu au moins dix mecs pour me mettre dans le taxi et pour que Phun (malheureusement pour lui) puisse être celui qui allait couper court à ce bordel.

     

    Mais alors pourquoi Phun ne m'a-t-il pas dit que j'avais été odieux ?! T ___ T Il faut vraiment qu'il arrête de jouer les grands seigneurs ! Argh !

     

     « - Ah merde, y'a eu ça, aussi. Noh était tellement soûl qu'il se comportait comme un gros dur, okay ? A un moment, il a voulu amener ses miches quelque part mais Phun ne l'a pas laissé faire, et le tirait en arrière. Noh n'était pas d'accord et a voulu envoyé Phun dans le décor, mais il a perdu l'équilibre. Heureusement, Phun a été rapide pour le rattraper. Putain, c'était comme une scène de ce genre de roman où le mec porte la fille dans ses bras parce qu'elle était sur le point de s'évanouir ».

     - Que c'est romantique !! »

     

    Peut-être que tu devrais juste écouter en silence plutôt que donner ton opinion, Palm.

     

     «  - Ouais, romantique mon cul. La fille a fini par en foutre une au mec et ils se sont tous les deux retrouvés par terre, dans notre version à nous. On était pétés de rire ! »

     

    Aaaaaaaaaaaah ! J'aimerais pouvoir disparaître, juste là maintenant !

     

    Ohm et Palm rigolent avant de poursuivre leurs commentaires.

     

    « Si je ne savais pas qu'ils ont tous les deux des petites amies, j'aurais été persuadé que j'étais en train de contempler un couple marié en train de se chamailler ».

     

     Okay, au moins il se souvient que j'ai une petite amie...

     

    J'arrête de les écouter après cette dernière sortie. (Ça devenait longuet). Maintenant, je me demande comment va Phun. Je n'ai pas pris la peine de regarder s'il avait des bleus quand je l'ai vu. Je suppose que j'étais définitivement trop bourré.

     

    « Et alors, est-ce que Phun va bien ? On t'a regardé le battre. Il n'est pas trop amoché, hein ? »

     

    Ohm me pose la question justement au moment où je me l'étais formulée à moi-même.

     

     « - Sais pas.

     - Tu n'as rien vu du tout sous la douche ?

     - J'étais ivre. J'étais dans les vapes. Je ne voyais pas clairement.

     - ... "

      

    Attendez. Est-ce qu'on ne vient pas juste de me piéger pour me faire avouer quelque chose ?

     

    «  PUTAIN DE MERDE, NOH ET PHUN ONT PRIS UNE DOUCHE ENSEMBLE ! »

     

     Eeeeeeh merde ! Ohm gueule, en plus, tellement que tout le monde dans la classe s'amène vers nous.

     

    Putain ! Ce n'est pas vrai !

     

    « Eh, connard ! On avait tous les deux nos boxers ! »

     

    Je sors cette excuse pour sauver mon cul mais Rodkeng (qui a couru nous rejoindre) me pointe du doigt comme s'il m'accusait de quelque chose.

     

     «  - S'il n'y avait pas quelque chose de bizarre entre vous, vous auriez pris cette douche nus comme deux mecs normaux. Mais il fallait que vous gardiez vos boxers, comme si vous aviez besoin qu'il y ait un truc pour vous retenir de faire quelque chose !

     - Whoooooo ! »

     

    Je déteste vraiment ces cons. Pourquoi ont-ils toujours besoin d'agir comme une chorale ? (Connards!) Pourquoi est-ce qu'ils s'enflamment dès qu'il s'agit de moi ?

     

    Je n'ai plus la force de me battre avec eux, de toute façon.

     

     Pendant que tout le monde s'amuse à se foutre de moi...

     

    «  Qu'est-ce qu'il se passe, les mecs ? Vou faites beaucoup de bruit ».

     

    Putain. Avec toutes les occasions de se pointer qu'il y a dans une journée, pourquoi faut-il que ce soit justement celle-ci qu'il ait choisie ?

     

    Je me retourne pour tomber sur Phun, l'autre partie dans cette querelle. Il se tient là, debout, inconscient de ce qui se trame. Personnellement, j'ai l'impression de voir un fantôme.

     

     « Whoooooooooooo ! »

     

     Et les voilà qui recommencent. Vous savez quoi ? Allez trouver une ou deux colombes à libérer de sa captivité et n'oubliez pas de jeter du riz au passage.

     

     « Souhaitons leur beaucoup de plaisir pour leur lune de mieeeeeeeeel »

     

    Rodkeng et Keng me poussent vers Phun. (Où sont mes putains de colombe ?! Et le riz ?! Vous m'envoyez déjà en lune de miel ? Putain!). On dirait que Phun ne comprend pas vraiment ce qu'il se passe, mais il sourit quand même. La bizarrerie de mes amis l'amuse beaucoup. Ça ne fait que rendre les choses plus difficiles pour moi -_-'

     

    Tu pourrais arrêter d'être à côté de la plaque comme ça ?

     

    « Ça vous dérange si j'emprunte la mariée pour un moment ? Je la ramène bientôt ».

     

    Bon sang, est-ce que tu réalises seulement ce que tu dis ? !

     

    Mes amis beuglent pendant qu'on m'entraîne dehors. Je vous dis pas, ma vie.

     

    « Qu'est-ce que tes amis faisaient ? Ça avait l'air amusant » me demande Phun, l'air excité, une fois sortis.

     

    Je ne sais pas quoi lui répondre.

     

     « Hum... »

     

    Je préfère lui demander ce à propos de quoi je me pose réellement des questions.

     

    « Est-ce que je t'ai vraiment battu ? Cette nuit à Lumphini Park ? »

     

     Il semble qu'il ne s'attendait pas à ça car il reste coi un moment.

     

    « - Pourquoi ?

     - Ohm dit que je me suis vraiment comporté comme un con quand j'étais bourré. Que je t'ai battu et tout. Merde, je suis vraiment désolééé ! J'étais soûl ! Je ne voulais pas faire tout çaaa ! »

     

     Je m'excuse platement car je me sens vraiment coupable. Pourquoi a-t-il été tellement sympa après ça, d'ailleurs ? Pourquoi a-t-il enduré tout ça ? Il ne s'est même pas plaint une fois.

     

    Je peux l'entendre ricaner et je perçois un soupçon de sournoiserie dans sa voix.

     

    « - Oui, ça m'a vraiment fait mal. Tu étais très violent. Je me demandais justement comment te le faire payer

     - Putain, je suis désolé ! Frappe-moi ! Vas-y ! Botte-moi le cul ! Je te laisserai faire tout ce que tu veux aujourd'hui ! 

     - Baisse la tête et ferme les yeux ».

     

     Bon dieu, il se prend pour un seigneur ou quoi ? Peu importe. Je ne peux pas dire non alors que je viens de lui permettre de faire ce qu'il voulait. J'espère qu'il ne cognera pas trop fort, quand même

     

    Y _ Y

     

     Je garde la tête baissée et mes yeux fermement clos pendant que je me demande ce que Phun va faire. Est-ce qu'il va me frapper sur le crâne? M'attraper l'oreille ? Me mettre un coup de coude ? Me mettre un coup de genoux dans le ventre ? N'importe quoi ? Lequel fait le plus mal, d'ailleurs ? Serai-je capable d'encaisser ce qu'il s'apprête à faire ?

     

     Je continue à retourner la question dans ma tête. Finalement, je sens un truc froid autour de mon cou.

     

     « Tu peux ouvrir les yeux maintenant ».

     

    Je le fais et vois les plaques en argent, le souvenir du tournoi de foot, pendre à mon cou.

     

      " Oh ! J'avais presque oublié ! Il en restait, alors ?! »

     

     Phun sourit en remuant la tête.

     

     « - Nan, il y avait une tonne d'étudiants qui bossaient, cette année. Et des anciens, aussi. J'ai juste pu en avoir un pendant que je nourrissais Earn.

     - Un seul ?

     - Ouais.

     - Et le tien ?

     - Ne t'inquiète pas pour ça. Celui-là est à toi ».

     

     Est-ce qu'il va arrêter de jouer les gentlemen ? Ça me stresse littéralement.

     

     «  Très drôle. Tu l'as eu, tu devrais le garder », lui dis-je sur le ton de la réprimande alors que j'essaie d'ôter le collier. Phun agrippe immédiatement mes mains et les tient fermement. Il me regarde étrangement, comme s'il était vraiment agacé par mon attitude.

     

     « Je...te le donne. Pourquoi es-tu comme ça... ? »

     

     Okay, j'oublie que je ne devrais pas me comporter comme ça. Phun remarque que j'ai cessé de vouloir l'enlever et lâche mes mains.

     

    « Tu as travaillé dur, toi aussi, tu en voulais sans doute un. En plus, les mecs le donnent généralement à leur petite amie ».

     

     Je n'ai aucun idée de la raison pour laquelle j'ai bien pu ajouter ça, mais c'est vrai. Les souvenirs d'événements importants comme celui-là sont précieux. Donc, si vous les offrez à quelqu'un, c'est généralement à la personne avec qui vous sortez. Phun pousse un long soupir, tellement long que je peux sentir son souffle.

     

    « Aim reçoit un tas de trucs de moi, déjà...laisse-moi juste te donner quelque chose, pour une fois. Ne refuse pas ».

     

     Qu'est-ce que je suis supposé répondre à ça ?

     

     On reste là, à se regarder en silence. Même si j'ai plein de pensées défilant en boucle dans ma tête. Je sais que c'est le cas de Phun, aussi. Ses yeux essaient de me dire quelque chose.

     

    « Hé Noh ! Oh, Phun ? Tu t'es perdu ? ».

     

     On sursaute tous les deux en entendant la voix d'Earn nous saluer et taquiner Phun. Ce dernier se retourne pour lui sourire.

     

     « Tu t'es perdu aussi ? » le taquine-t-il en retour.

     

    Earn ricane.

     

    « Tes bleus guérissent bien ? »

     

    Crétin ! Est-ce que tous ces gens vont s'arrêter de parler des merdes que j'ai faites à Lumphini Park ?!

     

     Phun rit et me jette un œil moqueur.

     

    « Je songeais à en parler à mon père ».

     

    Fais ce que tu veux, pleurnichard. Si je ne l'avais pas déjà cogné plusieurs fois samedi, je le ferais là maintenant.

     

     « Oui, tu devrais. Vous avez fini de discuter ? Il faut que je parle à Noh de quelque chose ».

     

    Donc, ces bâtards pensent que je suis un employé de Rotiboy (1) si je comprends bien ? Est-ce que j'ai besoin de commencer à distribuer des tickets pour que les gens qui veulent me parler fassent la queue ?

     

    Phun me sourit.

     

     « Oui, on a fini. Au fait, n'oublie pas pour vendredi, Noh », répond-il en me rappelant le week-end à Hua Hin. J'avais quasiment oublié, à vrai dire. Ean semble confus, alors qu'il regarde Phun s'éloigner.

     

     « - Qu'est-ce qu'il se passe vendredi ?

     - Rien. De quoi tu voulais me parler ? »

     

    Je change rapidement de sujet vu qu'apparemment, il veut discuter de quelque chose avec moi.

     

     «  Ah oui. Je suis venu te donner ça. Comme promis ».

     

     Earn me fait un grand sourire et me montre un lot de plaques militaires.

     

    Mais...qu'est-ce que c'est que ce bordel ?!

     

     « Oh, j'en porte un en ce moment ! » lui dis-je en pointant mon cou du doigt.

     

     Il n'a même pas remarqué, ou quoi ? -_-'

     

     Earn a l'air tellement décontenancé, on dirait qu'il a vu un fantôme.

     

    « Où l'as-tu eu ?! Personne dans l'équipe technique n'a pu en récupérer un, d'après ce qu'on m'a dit ! »

     

    On dirait que je suis donc le seul membre qui pourrait en avoir carrément deux ? Ah ah ah.

     

     « Phun vient juste de me le donner. Désolé, mec. Je suppose que ça te brise le cœur, mon frère ».

     

     Je plaisante en tapotant son épaule, mais je remarque que son expression devient grave.

     

    « Oui...ce doit être vrai ».

     

     Qu'est-ce qu'il marmonne ? Je n'ai pas entendu.

     

    « - Hein ?

     - Rien, rien. Je ferais mieux de retourner en cours. Mon groupe participe au Live contest, au fait. Je passerai déposer notre formulaire de candidature plus tard ».

     

     Earn change de sujet pour parler du Live constest que mon club accueille juste avant Noël. C'est une compétition où le meilleur gagne le droit de jouer pendant la réception de Noël et aussi une opportunité de participer au tournoi RAD à Wat Ratchbophit (2).

     

    Je fais un sourire amical à Earn.

     

    « Ouais, bien sûr. Dépose-le au club, okay ? Mais s itu es trop occupé, laisse-le à ma salle de classe », lui dis-je. Il me répond simplement par un bref sourire avant de me dire au revoir et de retourner en cours.

     

    Qu'est-ce qu'il lui prend ? Pourquoi a-t-il l'air aussi déprimé à cause de cette histoire ?

     

    Peu importe.

     

    C'est déjà vendredi que je pars pour Hua Hin ?

     

     

    A suivre...

     

     

     

    (1) A l'époque de la publication du roman, Rotiby était une chaîne de pâtisseries malaise implantée en Thaïlande. Elle était très populaire et les gens faisaient la queue pour y acheter des gâteaux. Depuis, le succès s'est tari et elle a a quitté la Thaïlande.

     

    (2) Il s'agirait d'une compétition musicale destinée à réunir des fonds pour la luttre contre le trafic de drogue.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     


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    Chapitre 27 : Pour qui je me prends ?

     

     Cette semaine a été incroyable pour tout le monde. Le tournoi de foot s'est achevé en apothéose, ce qui a mis tout le monde de bonne humeur. Même M. Fiem, qui habituellement se tient au portail avec un air menaçant, n'a pas pointé de la semaine. Je ne l'ai pas vu du tout, je suppose que c'est sa manière de célébrer l'événement. Je préfère ça à son poste ordinaire, vu que je n'ai plus à ranger ma chemise dans mon short. ^__^

     

    Mais même cette semaine, Dieu n'est pas de mon côté. Tout le monde est sur un petit nuage en ce moment, mais pas moi. Ce week-end sera un enfer -_-'

     

    En fait, je commence à oublier ce que ça fait, d'être heureux et de profiter de la vie. Parce que depuis que j'ai récupéré le titre de Président du club de musique d'Oak (contre ma volonté), je n'y ai pas toujours trouvé satisfaction. Même quand tout le monde se relaxe et est heureux, le pauvre président doit encore courir partout comme un poulet tout juste décapité, pour faire ceci ou cela.

     

    Qu'est-ce que je veux dire par là ? Je parle du Live Contest qui aura lieu dans quelques semaines. Notre club accueille l'événement chaque année. Nous profitons de l'occasion pour dénicher les meilleurs groupes afin d'accroître encore l'excellente réputation de notre école. C'est une compétition ouverte à tous, même ceux qui ne sont pas dans le club de musique. Ce n'est pas parce que vous en faites partie que vous êtes le meilleur musicien du coin, après tout. (Il suffit de regarder Ohm). (Je plaisante, il est bon à quelque chose quand même...enfin, sans doute?).

     

     Même Earn participe (et il est dans la Cheer Team). Ce mec est vraiment un bon chanteur, d'ailleurs. J'ai essayé de le soudoyer pour qu'il rejoigne notre club un bon paquet de fois. Il m'a aidé pour certaines choses mais en a décliné d'autres. Ça dépend du temps dont il dispose. Cette fois, Earn et ses amis de la Cheer Team entrent dans la compétition en tant que groupe. Je suis sûr qu'il va bien s'amuser.

     

    Le nom de Phun est aussi sur la liste, comme membre d'un autre groupe. (Quand est-ce qu'il a formé un groupe, au fait ?). Si je me souviens bien, il est à la guitare. Il se débrouille bien avec pas mal d'instruments, en fait. (Il a fait un récital de piano à la réception de Noël il y a 3 ou 4 ans, je crois). Il a failli rejoindre le club de musique aussi mais ce type est bien trop intelligent et polyvalent. Les profs l'ont incité à entrer au Conseil des étudiants plutôt. Sinon, ous aurions été dans le même club. (ou peut-être qu'il aurait été dans celui de Basket-ball ? Maintenant que j'y pense, il aurait tout aussi bien pu rejoindre celui de Sudoku. Ou de Math ? En gros, il est doué pour tout un tas de trucs. Je suppose que c'était le meilleur choix que de rejoindre le Conseil des étudiants).

     

    En plus de ces mecs, il y a environ un million et 800 000 personnes qui font la queue pour déposer leur candidature. Je ne peux m'empêcher de penser qu'ils sont juste là pour me faire avoir encore plus de boulot. Merci beaucoup. (Sérieusement, les mecs, vous n'avez pas à prendre ça au sérieux). La semaine prochaine, il y aura les éliminatoires préliminaires où on décidera quel groupe pourra participer à la compétition live. Je parie que je vais bosser jusqu'à 3 heures du matin au moins. (Vous avez entendu parler du réchauffement climatique ? Ce n'est pas une chose à encourager). (En fait, c'est juste que je n'ai pas d'argent pour aider l'école à payer les factures d'électricité).

     

    «  Qu'est-ce qu'il se passe, Noh ? T'es très silencieux aujourd'hui ».

     

    Avant que je ne sombre dans la folie, la voix de Phun me sort de ma transe (angoissée). Je sursaute avant de jeter un œil par la fenêtre. Le paysage révèle désormais des rizières à perte de vue. On est arrivé à Ratchaburi, sur la route de Hua Hin.

     

    « Arrête de faire autant de bruit...j'essaie d'entendre l'océan ».

     

    Je lui sors le pus mauvais prétexte de ma collection. Je l'entends ricaner en murmurant quelque chose à propos de ma bizarrerie.

     

     Hé, hé, vous devez tous être curieux de savoir comment j'ai atterri là avec lui. Eh bien, on a séché les cours aujourd'hui ! Je prends une pause avec mes devoirs de président du club de musique juste pour quelques jours. (Je suis extrêmement populaire ces derniers temps, tout le monde vient me raconter ses petits soucis). Je suis assis dans la voiture noire de Phun vu que nous avons plus ou moins accepté de partir en week-end à Hua Hin avec les filles la semaine dernière.

     

     En toute sincérité, je trouve que c'est plutôt une bonne idée. Je le vois comme une chance d'échapper à tous ces idiots avec leurs problèmes interminables. (« P, c'est pas grave si le formulaire est froissé ? » ; « Est-ce qu'on a le droit de plier le formulaire ? » ; « J'aimerais changer le nom de notre groupe » ; « Est-ce qu'on devrait chanter des chansons thaï ou plutôt internationales ? » ; « on a pas assez de membres, est-ce qu'on peut en prendre dans les autres groupes ? » ; « Est-ce que ma petite amie peut venir me voir jouer ? » ; « Mon chat ne veut pas manger de thon, qu'est-ce que je peux faire ? ». Vous savez quoi ? Allez vous faire foutre).

     

     Donc, là, je suis assis sur le siège derrière le conducteur. Naturellement, Aim est assise devant à côté de Phun, et Yuri et moi à l'arrière.

     

    « Noh, mange ça, mange ça » me dit Yuri en extirpant un Doritos rouge de son sac plastique. Elle a prévu pas mal d'en-cas pour le voyage. Je ne refuse jamais de la nourriture, bien sûr. Je déguste ce qu'elle me donne et demande à Phun s'il en veut.

     

    «  Bâtard, tu me demandes ça comme si c'est toi qui l'avais amené ».

     

    Bon dieu, il est en train de me réprimander, là . J'étais sympa, pourquoi est-ce que tu es odieux ?!

     

    Yuri glousse devant notre dispute infantile avant de tendre elle-même le sac à Phun ;

     

     « Tu devrais en prendre un peu, c'est un gros sac. Ce n'est pas comme si j'allais être capable de finir tout ça à moi seule, de toute façon ».

     

    Je jette un oeil dans la direction de son visage, magnifiquement stupide. Il décline d'abord poliment avant de finalement en accepter un peu. Parfois, j'ai envie de lui botter le cul quand il devient imbuvable.

     

    « Tu en veux, Aim ? » demande Phun à sa petite amie après avoir réalisé qu'elle était silencieuse depuis un moment. Je lui jette un regard en biais, elle affiche une expression ennuyée avant de se tourner vers sa fenêtre.

     

    « Je suis au régime... »

     

    Je ne suis pas complètement sûr que ce soit une réponse ou juste une information qu'elle tient à faire connaître à tout le monde. Quoi qu'il en soit, je vais juste retourner à mon snack, moi.

     

     « On peut devenir un couple de petits gros ensemble, nous, hein Noh ? » dit Yuri avec un grand sourire, qui révèle ses adorables canines. Je ne peux m'empêcher de lui sourire en retour.

     

    « Ouais ! Pas besoin de s'inquiéter de se noyer dans l'océan quand tu as ta propre bouée intégrée ».

     

    Yuri éclate de rire.

     

     « Nos enfants ne pourront pas avoir une brioche comme nous, par contre. Il faudra qu'on s'assure qu'ils sont en bonne santé ».

     

    Tof, tof, tof. J'avale de travers et recrache une partie. Je n'ai aucune idée de quoi faire maintenant, avec tous ces morceaux de Doritos qui ont giclé sur mon nez. Yuri est morte de rire.

     

     « Noh, je plaisantais ! Pourquoi es-tu aussi surpris ?! Ah ah ah ! Bois un peu d'eau ! ».

     

    Elle continue de rire en me tendant un verre qu'elle a rempli à l'aide d'une bouteille.

     

    Les filles et leur humour, de nos jours. Tu trouves ça drôle de provoquer un crise de panique chez quelqu'un ?

     

    J'accepte le verre d'eau en lançant un bref regard à Phun qui m'en renvoie un via le rétroviseur intérieur. Qu'est-ce que tu trouves de si drôle, ducon ?

     

    °°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°

     

    Phun continue à conduire pendant qu'Aim, Yuri et moi discutons tout au long du trajet. On fait plusieurs arrêts à des stations essence et en ramenons des snacks à chaque fois. (Yuri dit que c'est moins cher de faire notre stock dès maintenant plutôt qu'à l'hôtel, vous y croyez, vous?). A un moment, Yuri et moi avons essayé des lunettes de soleil marrantes, et avons joué avec bruyamment. A côté, Phun et Aim ont plus l'air d'être du genre silencieux. A chaque fois que je les regarde, Phun marche derrière elle.

     

    On arrive finalement au complexe hôtelier dans l'après-midi. Yeah ! Je consulte ma montre qui me dit qu'il est 15h passées. Phun et Aim vont nous enregistrer à la réception.

     

     « L'hôtel est vraiment sympa, hein? » me dit Yuri en se vautrant joyeusement sur l'un des canapés modernes du hall d'accueil. Elle rebondit un peu dessus, ce qui l'amuse beaucoup, je suppose.

     

    « - Ce canapé est en poil d'écureuil !

     - C'est vrai ?! »

     

    Vous ne me croiriez pas si je vous disais à quel vitesse je me suis levé. Les gens, il faut que vous compreniez quelque chose. Yuri est une grande amazone de la cause animale, surtout des petites bestioles. Elle les adore tellement que je pense qu'elle pourrait très bien travailler pour Greenpeace après le lycée. Cela signifie que l'idée de faire du mal à ces petites créatures est un sujet à ne pas aborder quand elle est dans les parages. (Une fois, elle m'a fait arrêter de jouer à un jeu vidéo Tic et Tac parce qu'elle se sentait mal pour eux vu qu'ils sont attaqués par des pommes dedans).

     

    « Non », dit-elle en me jetant un oreiller au visage. (Je l'ai vraiment cherché, celui-là). On finit par glousser bêtement tout en continuant à chahuter ensemble. Cela dure jusqu'à ce que Phun et Aim reviennent avec les clefs dans la main.

     

    « Qu'est-ce que vous faites ? » demande Aim en souriant.

     

     Yuri saisit cette opportunité de se plaindre de moi.

     

    « Noh est une vraie brute ! Je n'en peux plus ! Est-ce que tous les garçons de votre lycée sont des sauvages pareils, Phun ? »

     

    Hey ! Ne mets pas tout le monde dans le même sac comme ça !

     

    Phun sourit en me jetant un regard. Il a l'air de trouver ça drôle.

     

    « Non, il n y'a que lui, Yuri ».

     

    Ce bâtard n'aide pas du tout, là.

     

    Je lorgne dans sa direction avant de recommencer à embêter Yuri.

     

    « Tu es une sauvage aussi. Je me demande si toutes les filles de ton lycée sont comme ça. C'est le cas, Aim ? »

     

    Yuri me tape plusieurs fois sur le bras après avoir entendu ma question. (Hé, ça fait mal).

     

     Aim ricane devant nos excentricités.

     

    « C'est sympa que vous soyez si proches, tous les deux. Vous ne verrez aucun inconvénient à dormir de la même chambre, en conséquence, hein ? » dit-elle en me tendant l'une des clefs. Mais je reste coi. Mon regard, rempli d'hésitations, fait des aller-retours entre la clef et le visage de Phun. Ce dernier affiche lui-même une expression troublée.

     

    « - Aim, je croyais qu'on en avait parlé ? 

     - Non, tu as parlé, puis décidé que j'étais d'accord avec toi ».

     

    Oh merde. Qu'est-ce qu'il s'est passé entre ces deux-là ?

     

    Yuri et moi restons silencieux à nous regarder, pleins de confusion. Phun et Aim continuent de se disputer.

     

    « Franchement ! Si j'avais su qu'on passerait la nuit dans deux chambres séparées, je ne me serais pas embêtée à partir en week-end avec toi ! »

     

    Aim hausse la voix au point que le personnel de la réception commencent à nous regarder. Phun remue la tête avec agacement avant d'entraîner Aim dans un coin plus discret.

     

    « On revient, Noh, Yuri », nous dit-il.

     

     On reste là où on est, complètement abasourdis. Yuri s'avachit de nouveau sur le canapé.

     

    « Je suppose qu'Aim veut partager sa chambre avec Phun ».

     

    Je la rejoins sur le sofa, tout en songeant au fait que je ne comprends vraiment pas les femmes de nos jours.

     

     « Ça ne se fait pas ».

     

    C'est ce que je pense.

     

    « Pourquoi ? Ils l'ont déjà fait. Ce n'est pas si bizarre pour eux de dormir dans la même chambre, Noh ».

     

     Yuri continue de soutenir son amie et oublie tout ce qui ne s'y réfère pas.

     

    « Et nous, alors ? »

     

     J'espère que ma question va faire diversion. Mais Yuri devient silencieuse, alors je poursuis.

     

     « Ce n'est pas une bonne idée pour un garçon et une fille de dormir dans la même chambre d'hôtel comme ça. Nous, les mecs, n'avons rien à perdre mais vous, si. Et si quelqu'un qui connaît vos parents nous voit ? Alors quoi ? Je n'ai pas assez d'argent pour demander ta main, tu sais ».

     

    Je suppute que finir ma phrase avec une blague va détendre l'atmosphère. Je caresse gentiment les cheveux de Yuri, toujours assise en silence. Mais ce qu'elle me dit ensuite me laisse pantois.

     

     «  - Tu me trouves dégoûtante ?

     - Pourquoi tu dis ça ? »

     

     Ses yeux ronds commencent à devenir rouges au point de m'inquiéter.

     

     « Parce que tu...ne m'a jamais touchée ».

     

     Hé, ne commence pas à pleurer, maintenant ! Je faiblit fortement devant une fille qui pleure. J'aimerais qu'il en soit autrement.

     

    « - Hé, ce n'est pas si terrible. J'essaie juste d'être respectueux.

     - Tu me trouves vulgaire.

     - Non.

     - Si.

     - Non.

     - Noh... »

     

    Elle fait la moue comme les petits enfants quand elle réalise qu'elle ne gagnera pas. Je ne peux m'empêcher de rire devant la manière dont elle se comporte.

     

     «  - Tu es assez grande pour comprendre ce que je veux dire », lui dis-je en lui tapotant gentiment la tête.

     

    (Je ne lui fiche pas des beignes comme je le ferais avec Ohm).

     «  - Mais je suis jalouse quand j'entends mes amis...parler de ce genre de chose. Je veux dire...J'ai l'impression qu'ils sont tellement amoureux les uns des autres.

     - ... »

     

     

    Je n'ai aucune idée de quoi lui répondre. Je suppose que c'est parce que je sais très bien que je ne peux pas donner à Yuri ce qu'elle veut vraiment. Ses yeux sont rouges, maintenant. Je peux seulement prendre sa petite main dans la mienne pour la réconforter.

     

    Yuri reste assise en silence un instant avant de reprendre :

     

    « Je sais que tu ne m'as jamais aimée, Noh. Et pourtant, j'ai tout fait pour. Tu ne m'as jamais aimée ».

     

    Une larme atterrit sur le dos de ma main et je suis incapable de faire quoi que ce soit pour l'arrêter. Le temps que je réalise ce qu'il se passe, Yuri pleure comme une fontaine. Je ne suis pas doué pour consoler les filles. Tout ce que je peux faire est renforcer ma prise sur sa main.

     

    «  Qu'est-ce qu'il y a, Yuri ? ».

     

    La voix grondante d'Aim nous parvient de derrière moi. Je lève la tête vers elle, une expression suppliante sur le visage, vu que j'ai désespérément besoin d'aide. Phun et Aim ont l'air très déconcertés par ce qu'ils voient. Après un moment, Yuri se lève.

     

     « Aim, j'ai besoin de repos. Je vais dans la chambre », dit-elle avant de prendre ses bagages et ses autres sacs et de se diriger vers l'étage. Aim court après elle.

     

     Phun me regarde avec une expression perplexe comme s'il voulait me demander quelque chose. Mais il ne pose aucune question. Sans doute parce que je remue ma tête de dépit. On se dirige alors vers notre propre chambre.

     

     On se traîne dans le couloir qui y mène, décoré de façon élégante et moderne. Je viens juste de remarquer qu'il doit s'agir d'un hôtel chic. Çà aurait été très cher s'il avait fallu qu'on paie ce séjour de notre poche. La réception nous a dit que notre chambre était appelée Studio Piers et je me demandais pourquoi. Je l'ai compris à l'instant où Phun a ouvert la porte. Il y a une piscine privée au fond de la chambre (elle est commune avec les chambres voisines). Mes yeux scintillent quand j'aperçois la vue qu'on a du balcon. Je parie que les filles doivent piailler d'excitation aussi.

     

    Je balance rapidement les bagages sur le lit et inspecte la chambre. C'est très joliment orné. Il y a une télé à écran LCD encastrée dans le mur, un lit king-size et même une sorte de spa dans la salle de bain. C'est vraiment le luxe !

     

    Je manque de remarquer que Phun a commencé à ranger ses affaires tellement je suis émerveillé par la chambre.

     

    « Tu n'as pas l'intention de ranger tes vêtements, alors ? » me dit-il.

     

    «  Pour quoi faire ? Je prendrai juste ce dont j'ai besoin quand j'en aurai besoin. On ne reste que deux jours, de toute façon ».

     

    On est juste différents, lui et moi. Ma nonchalance fait rire Phun, qui continue de mettre ses vêtements sur des porte-manteaux et de les pendre ensuite dans le placard. Je peux entendre les filles pousser des cris d'enthousiasme dans la chambre voisine.

     

    « Je suppose qu'elles sont de meilleure humeur, maintenant », me dit Phun avec un grand sourire. Je ne peux m'empêcher de lui sourire en retour. Rapidement, on se change dans l'intention d'aller inviter les filles à venir s'amuser à la plage avec nous, vu que le soleil ne tape pas encore trop fort. En enfilant mes tongs, je sans soudainement une pique de curiosité et décide de poser une question à Phun.

     

    « Euh... ».

     

    Il abandonne ce qu'il fait pour tourner son attention vers moi.

     

    «-  Quoi ?

     - Pourquoi est-ce que tu ne partages pas ta chambre avec Aim ? ».

     

     Je veux juste savoir ce qu'il a en tête. Il n'hésite pas une seconde avant de me répondre.

     

    «  Ce n'est pas correct. J'ai fait assez de mauvaises choses comme ça », dit-il en me tendant des draps de plage pour tous les deux. Je me sens mieux en entendant sa réponse.

     

    Je lui mets une tape dans le dos avec un grand sourire.

     

     « De mon point de vue, tu n'es plus un sale type, tu sais ».

     

    Parce que s'il m'avait dit qu'il avait fait ce choix juste pour coucher avec moi, je lui en aurais mis une avant de retourner aussi sec à Bangkok.

     

     °°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°

     

    On quitte notre chambre et allons taper à la porte de celle d'à côté pour inviter les filles à la plage. On dirait qu'elles nous attendaient. Je l'avoue, j'ai eu du mal à déglutir quand je les ai vues dans leurs bikinis. Je suppose que c'est de ça dont on parle quand on dit que l'adolescence est le meilleur âge de la vie ?

     

     Phun semble parfaitement savoir ce qui me traverse la tête, puisqu'il décide de m'écraser le pied. Ça fait mal, putain ! Quoi, je ne peux même pas regarder ta copine ?

     

    « Prenons ces trucs avec nous ! » s'écrie Yuri avec excitation en attrapant un ballon de plage et un gros dauphin gonflable. Je me précipite pour l'aider à les porter. Je ne sais pas si c'est moi qui me fais des idées, mais j'ai l'impression qu'elle ne veut même pas me regarder.

     

    On marche, plus vite que la normale, vers la plage devant l'hôtel. On se trouve un coin où il n'y a pas trop de monde. La plupart des gens autour sont des touristes étrangers (hé hé, exactement mon style). A côté de ça, les pauvres locaux comme nous ruons dans la mer aussitôt qu'elle est en vue. Enfin, trois d'entre nous le faisons. Ça prend un moment avant de convaincre Aim de se joindre à nous.

     

     " Allez, Aim ! Ce week-end était ton idée ! » lui crie Yuri de l'eau, où elle est déjà à moitié entrée. Phun et moi y sommes aussi, et on l'attend également.

     

    « Pas question...Je ne sais pas nager », dit-elle, penaude, et on ne peut s'empêcher de partir dans un grand éclat de rire.

     

    A quel école primaire as-tu été, Aim ? Comment c'est possible que tu ne saches pas nager ?

     

    J'entends Phun rire en même temps que nous, alors qu'on est toujours pliés en deux.

     

     « Où est le problème ?! Ce n'est pas profond du tout ! On ne nage pas, en plus ! Tu vas t'asseoir là et nous regarder ?! ».

     

     Yuri continue d'essayer de persuader son amie de venir nous rejoindre. Je regarde Aim remuer la tête en avisant le rivage. Yuri piétine sur place comme un enfant faisant un caprice avant d'attraper le bras de Phun.

     

    « - Phun, s'il te plaît, va lui parler ! S'il te plaît ? S'il te plaît ? Allez ! S'il te plaît ? S'il te plaît ? ... 

     - Que veux-tu que je... »

     

     Phun rigole devant le comportement de Yuri qui serre fort son bras en le suppliant.

     

    « Fais juste ce que tu peux. S'il te plaîîîîîîît ? »

     

     

    Hé hé. Comment dire non dan ce genre de situation ? (Je suis la preuve vivante de cette impossibilité). Même quelqu'un comme Phun ne le peut pas et finit par céder. Il retourne sur la plage vers là où Aim est. On les regarde avoir une discussion, on dirait qu'ils tombent d'accord sur quelque chose. (On ne fait que s'amuser, dans cet océan, vous savez, vous n'êtes pas en train de négocier l'achat de stocks). Finalement, Phun fait un sourire et opine de la tête avant d'amener Aim dans ses bras jusqu'à nous.

     

     « On arrive ! La princesse est là ! » crie-t-il avant de balancer sa copine dans l'eau.

     

     Yuri et moi entrons dans un fou rire alors qu'Aim émerge et commence à hurler.

     

     

    « Phun ! Ce n'est pas ce qu'on avait décidé ! » proteste-t-elle en lui tapant la poitrine.

     

    Phun rit tellement que ses yeux sont presque fermés.

     

     « Eh bien, tu ne m'as pas dit comment tu voulais aller à l'eau ».

     

    On s'est mis à tous s'éclabousser, personne ne voulant laisser l'autre se mouiller par lui-même. Je me souviens qu'Aim a poussé Phun dans l'eau en représailles mais il n'a pas voulu y aller tout seul. Il a employé ses bras fins, et pourtant pleins de force, pour m'y entraîner avec lui. (J'étais sous le choc!). Par conséquent, c'est ici qu'ont débuté les nombreuses tentatives de noyade de la journée !

     

    On a batifolé bruyamment dans l'eau pendant un bon moment avant de retourner sur la plage et de jouer avec le ballon qu'on avait ramené. C'était crevant d'avoir à courir après lui, surtout compte tenu du fait que tout le monde refusait de le faire à part moi. Ils s'amusaient beaucoup, en envoyant le ballon dans toutes les directions, de manière à ce que je ne puisse surtout pas l'attraper.

     

     Même si en apparence, on passait un super moment tous ensemble, j'avais remarqué que Yuri m'avait à peine dit deux mots. Elle ne me regardait même pas. S'il arrivait à nos yeux de se rencontrer, alors, alors elle était la première à détourner le regard. Je ne suis pas complètement sûr qu'il y ait un malentendu entre nous, donc j'ai essayé de me comporter aussi normalement que possible.

     

    « Tu as froid ? »

     

    J'ai finalement décidé que je devrais essayer de lancer la conversation avec elle (même si je ne sais pas exactement quel est le problème entre nous). Je patauge dans l'eau en me dirigeant vers elle. Elle est juchée sur ce dauphin gonflable depuis qu'on a arrêté de jouer sur la plage. Le vent commence à souffler fort, je ne peux m'empêcher de m'inquiéter un peu.

     

    « Hum...non ».

     

     C'est à peine une réponse. Je trouve ça vraiment bizarre vu que Yuri est une pipelette habituellement. C'est difficile de la faire taire. Mais là ? J'ai quasiment besoin de la supplier pour qu'elle dise quoi que ce soit. Qu'est-ce qu'elle a, à la fin ?

     

    « Ça ne va pas ? Tu es très silencieuse, aujourd'hui »

     

    « Aïe ! »

     

     

    Avant que Yuri et moi ne puission avoir notre conversation, Aim laisse échapper un cri de douleur. Je me retourne vers le couple sur la plage pour voir ce qu'il se passe. Aim est désormais assise sur le sable. Phun inspecte la cheville de sa copine avant de me faire un signe de la main pour m'indiquer qu'elle est foulée. J'acquiesce en faisant un mouvement de tête et Phun prend Aim sur son dos avant de se diriger vers l'hôtel. Yuri regarde Aim un long moment avant de reporter son attention sur ses pieds, avec lesquels elle fait gicler de l'eau. Plus je vois son expression nonchalante, puis je m'agace.

     

    « Yuri, on est en vacances ensemble. Tu ne devrais pas te vexer comme les gamins ».

     

    Mon ton doit sonner très froid quand je lui fais des reproches car elle se retourne brusquement vers moi et me dévisage avec un regard acerbe.

     

    « Je ne suis pas une gamine ! » crie-t-elle.

     

     Je n'ai jamais vu ses yeux s'embraser comme ça avant. Pour être franc, je n'ai même jamais vu Yuri aussi énervée. Mais aujourd’hui, on dirait qu'elle est très en colère à cause de quelque chose. Je fronce les sourcils en la regardant descendre de son dauphin. Je commence à être intrigué, à la voir se tenir droite au milieu de la mer, ses yeux emplis de fureur. Mais en même temps, on dirait qu'elle cherche à me provoquer.

     

    « Tu es vraiment hétéro, Noh ? »

     

    Ses lèvres bougent et voilà les mots qui en sortent.

     

    Elle attrape ma main et la place alors sur ses seins.

     

     A suivre...

     

     

     

     

     

     

     


    7 commentaires
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    Un petit rappel rapide avant ce chapitre : désormais, le rythme de publication du blog sera hebdomadaire, un chapitre tous les vendredis. La publication a en effet rattrapé les chapitres traduits d'avance que nous avions ! Merci de votre fidélité et bonne lecture !

     

    Chapitre 28 : Restons juste comme ça

     

     Je retire rapidement ma main à l'instant où je réalise ce qu'il se passe. Puis, je commence à m'énerver.

     

     «  - Qu'est-ce que tu fais, Yuri ?!

     - Tu es vraiment hétéro, Noh ? »

     

     Au lieu de me répondre, elle répète sa question. Elle attrape ma main et me fait tâter sa poitrine une nouvelle fois. Là, elle enfonce ses doigts dans ma chair et me force à presser ses seins. La colère me fait trembler.

     «  - Pour quel genre de mec tu me prends ?

     - Un pervers ! » me crie-t-elle en approchant son décolleté de mon nez.

     

    Je n'avais pas idée que Yuri était ce type de personne.

     

    «  Tu me déçois, Yu. »

     

    Je n'ai rien d'autre à lui dire. J'utilise ma main libre pour la repousser avant de m'excuser et de me lever pour retourner près du rivage. Je suis tellement sur les nerfs que mon corps entier est traversé de spasmes. Je récupère une serviette en remontant la plage pour m'en recouvrir vu que je ne veux pas que qui que ce soit voit l'expression furieuse sur mon visage. Mais j'entends un bruit de pas rapide derrière moi juste avant de sentir une masse de 45 kilos s'abattre sur mon dos.

     

    «  Qu'est-ce que tu fais, Yu ?! »

     

    Visiblement, Yuri a décidé de me sauter dessus en dépit du fait qu'on vient juste de se disputer.

     

    « Je t'aime tellemeeeeeeeeeeeeeeeeent ! » s'exclame-t-elle en refermant ses bras sur mon cou. Je suis totalement ébaubi par ce qu'il se passe.

      «  - Quoi ?! 

     - En fait, je me demandais si je serais capable de crier à l'aide si tu avais vraiment l'intention de me faire quelque chose, étant donné que la plage est remplie d'étrangers (1) »

     

    Elle ignore donc ma question et continue de parler avec animation. Entre ses délires et son ton joyeux, je prends conscience que je ne suis plus vraiment en colère.

     

     « Tu me testais ?! »

     

     Je sautille légèrement ce qui déséquilibre Yuri qui me re-saute immédiatement dessus. Elle pousse un cri de contentement.

     

    « Juste un peu ».

     

    Ses petits bras m'enserrent plus fortement maintenant. Je suppose qu'elle a peur de glisser. Même si j'étais énervé un peu plus tôt, je ne peux m'empêcher de laisser échapper un ricanement.

     

     « Tu aurais eu des problèmes si tu avais fait ça à quelqu'un d'autre, tu sais ça ?  Ne refais plus jamais ce genre de test avec quoi que ce soit, okay ? ».

     

    C'était vraiment une chose stupide à faire, et je me sens en devoir de le lui rappeler. Yuri continue à couiner de joie et ne montre aucun signe d'épuisement.

     

     « Je suis tellement heureuse que ce soit toi mon petit ami » me dit-elle en appuyant sa tête contre la mienne.

     

    Hein ? Donc je suis vraiment le copain de Yuri ?

     

    «  Hé, Noh !

     - Hum ? »

     

     J'avais presque oublié qu'on était sur le point de regagner l'hôtel.

     

    «  Comment ça se fait que tu n'aies jamais dit aux autres que tu n'étais pas réellement mon petit ami ? »

     

    Ah, donc elle s'en rappelle, quand même. Que c'est surprenant.

     

    « Parce que tu as dit à tout le monde que je l'étais, comme j'aurais pu dire le contraire après ça ?

     - Je suis vraiment une magouilleuse, hein ?

     - Ouais ! »

     

     Yuri me donne une petite tape sur la tête.

     

     Quoi ?! Je n'ai rien dit de mal !

     

    «  Tu aurais pu être plus gentil. Tu réalises qu'une fille qui t'aime bien peut se faire des idées si tu ne la détrompes pas ? »

     

    Ah donc elle a aussi conscience de ça ? Je suis fier d'elle, en un sens.

     

    «  Nan, laisse tomber », lui dis-je tout en pensant aux raisons pour lesquelles j'ai laissé cette situation perdurer.

    Je n'ai pas contredit Yuri parce que je ne voulais pas la mettre dans l'embarras. Mais en plus de ça, je me suis dit qu'avoir une copine rendrait ma vie plus sereine. A cette époque, je jouais avec le groupe, on avait un concert de prévu à l'auditorium du lycée du couvent et le rythme était complètement fou. Je veux dire, j'étais content que les filles nous aiment bien. Mais une fois le concert terminé, j'ai commencé à recevoir des appels bizarres tous les jours et je n'étais pas très à l'aise vis-à-vis de ça.

     

    « Je savais que tu te comporterais en gentleman. Tu ne m'as jamais rabaissées. C'est bien que j'aie été la première fille à décréter que tu étais son copain, car tu n'aurais pas dit non à une autre non plus. Argh, j'aurais été tellement triste »

     

     En gros, je suis comme un article dans un magasin, je suis à celle qui pose la main sur moi en premier  ?

     Je trouve cette histoire très drôle, à vrai dire. Franchement, je n'ai pas dit la vérité aux gens parce que Yuri est vraiment une fille géniale. C'est loin d'être terrible de l'avoir pour amie. S'il s'agissait d'une fille très chiante, je l'aurais envoyé sur les roses à la seconde où elle aurait commencé à dire que j'étais son copain.

     On arrive finalement aux douches. Je laisse Yuri descendre de mon dos pour qu'elle puisse se rincer.

     

    «  Noh...

     - Quoi ?

     - Dis-le moi quand tu rencontreras quelqu'un que tu aimes vraiment. Je t'aiderai » me dit-elle soudainement.

     

    Elle ne me regarde pas, toutefois. Je la dévisage alors qu'elle enlève le sable de ses jambes et je souris légèrement.

     

     

    « Oui, d'accord.

     - Je suis sérieuse. Au début, je pensais que si je continuais à faire semblant d'être ta copine, tu finirais par tomber amoureux de moi »

     

     Oh, Seigneur. En quoi c'est logique, exactement, Yuri ? Je ne peux m'empêcher de rire en entendant son raisonnement ridicule.

     

    «  Ne rigole pas. Après un moment, j'ai compris que tu n'avais pas le moindre sentiment pour moi. Finalement, j'ai laissé tomber et accepté que ça n'arriverait jamais » me dit-elle en m'aidant à rincer ma jambe avant d'éteindre le jet d'eau. Son sourire est aussi éclatant que jamais.

     

    « J'ai hâte de rencontrer cette personne, qui qu'elle soit. Je veux être la première à la voir ».

     

     Je regarde le doux sourire de Yuri, empli de chaleur. Je sens un tiraillement dans ma poitrine. Pourquoi est-ce que je ne peux juste tomber amoureux de Yuri ? Elle est tellement gentille avec moi.

     

     Quant à la personne qui me plaît vraiment, eh bien...

     

     Le visage de Phun est la première chose qui apparaît dans mon esprit, bien que je ne sache pas quel genre de sentiment j'ai pour lui exactement. Je ne sais pas si c'est de l'amour. Mais je sais que je tiens énormément à lui. Aussi longtemps qu'il sera près de moi, il n'y aura rien d'autre au monde que je ne voudrai.

     

    « Noh... » m'appelle Yuri. On est toujours sous les douches.

     « Quoi ? Tu ne veux pas retourner à l'intérieur ? Il commence à faire vraiment frisquet.

     - Tu pourrais m'embrasser ?

     - …

     

    Ses yeux noirs me scrutent comme s'ils me suppliaient. Mais...

     

     «  - Ca n'arrangera pas les choses, Yu. Ce serait même bien pire, crois-moi »

     

    Yuri se force à rire.

     

    «  C'est ce que je me disais. Et me prendre dans tes bras ? Juste un peu ? »

     

    Je souris gentiment devant ses tentatives de négociation avant de tendre mes bras vers elle pour l'enlacer.

     

    « C'est mieux pour toi de me laisser et de trouver un mec bien à aimer.

     - Mais tu es le meilleur garçon que je connaisse », dit-elle d'une voix étouffée avant de me serrer un peu plus fort.

     

    Dans des moments comme ça, je me déteste de ne pas être capable de tomber amoureux de Yuri.

     

    °°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°

     

    Le jour arrive enfin à son terme et je me sens complètement vidé. Aim peut de nouveau marcher donc on a décidé d'aller en ville en voiture et de s'empiffrer dans un restaurant. Quand on est revenus à l'hôtel, j'avais à peine assez d'énergie en réserve pour prendre une douche avant de m'étaler dans mon lit, exténué.

     

     « Je suis moooooooooooort ».

     

    Honnêtement, je n'ai aucune idée de ce que j'aurais pu dire d'autre, à ce stade.

     

     Phun, occupé à ranger des trucs dans les armoires, se tourne vers moi en ricanant.

     

    «  Je ne rappelais pas que c'est toi qui avais conduit

     - Oui, bon, je sais, tu es encore plus fatigué que moi, d'accord ? »

     

    Il n'avait même pas besoin de me le faire remarquer. Je veux dire, rien que respirer me fatigue, moi. Je me repositionne dans mon lit avant de regarder par la fenêtre. J'entends les pas de Phun s'approcher de moi.

     

    «  Tu veux déjà dormir ?

     - Oui.

     - Alors, j'éteins la lampe ».

     

     Il n'attend pas ma réponse et appuie sur l'interrupteur. Les seules choses qui me rendent capable de déterminer que Phun s'est allongé dans le lit près du mien sont la lueur de la lune et le bruit du matelas qui s'affaisse.

     

     « N'oublie pas de prier avant de t'endormir », lui dis-je, même si je n'ai pas regardé s'il l'a fait ou non. Je me retourne et vois son ombre s'asseoir au pied du lit et se mettre à prier, juste comme je lui ai dit. Il s'incline trois fois avant de venir se coucher près de moi. La lune me permet de constater qu'il a mis son bras sur son front.

     

     « Qu'est-ce qu'il se passe ? Quelque chose ne va pas ? »

     

     Les gens qui vont mal prennent toujours cette pose.

     

    « Je ne sais pas... » me répond-il sans bouger son bras.

    Un silence s'installe entre nous dans l'obscurité.

     

     « …

     - Quelque chose m'a travaillé aujourd'hui... »

     

    Phun se met finalement à parler après être resté silencieux assez longtemps pour que je commence à m'endormir. Je sursaute et cligne brusquement des yeux pour chasser le sommeil.

     

     «  Quoi donc? Le fait que ton bazar pue comme un rat crevé ? »

     

     Comme prévu, une main s'abat droit sur mon crâne.

     

     « Tu veux que je te mette la tête dedans pour te faire une meilleur idée, connard ? Je voulais parler de...quand je vous ai vus, toi et Yuri, dans les bras l'un de l'autre...tout à l'heure. »

     

    Phun prend bien le temps de détacher chaque mot pour évoquer cette chose qui s'est passée bien plus tôt dans la journée.

     

    Très observateur, hein ? Comment je suis censé lui répondre ?

     

     «  Jaloux ? »

     

    Je prends le parti de le taquiner et pourtant, c'est moi qui ressens une douleur étrange dans la poitrine. Vous savez, comme quand vous essayez de mettre un peu de lumière dans une situation complètement désespérante ? Eh bien c'est ce genre de douleur.

     

    Phun soupire assez fort pour que je l'entende.

     

    « Pathétique, hein ? »

     

    Il se tait un moment avant de continuer.

     

    «  Je n'ai même pas le droit de ressentir ça ».

     

    Je ne peux que rester silencieux en entendant ces mots. Je ne veux surtout pas reconnaître que de le voir porter Aim partout comme aujourd'hui me rend malade, moi aussi. On écoute tous les deux le bruit léger des vagues atteignant le rivage. C'est exactement comme ce que je sens à l'intérieur de moi à cet instant précis. Comme si un poing venait s'écraser contre mon cœur encore et encore...

     

    « Est-ce que tu aimes Aim? »

     

     Soudainement, je décide de lui poser cette question. Je n'ai aucune idée de pourquoi je le fais. Je jette un coup d'oeil en directement de Phun, qui a une drôle d'expression sur le visage.

     

    « Je ne sais même pas ce que c'est, l'amour. Je sais que je tiens à elle. Et que...je suis près à veiller sur elle.

     - Alors, c'est probablement de l'amour ».

     

    La réponse de Phun est claire comme de l'eau de roche. Mon cerveau est désormais hors service. Je ferme les yeux, bien que je sois déjà dans une pièce sombre.

     

     «  Noh...

     - ... »

     

    Phun sait très bien que je l'écoute toujours, même si je ne réponds pas. Il poursuit, de sa voix profonde.

     

    « Ce que je viens de dire à propos d'Aim...j'éprouve la même chose pour toi, tu sais ».

     

    Pourquoi a-t-il dit ça ?

     

     « Pourquoi dis-tu ça ? ».

     

    Je lui pose directement la question alors que mes propres émotions me submergent. Il y a tellement de choses qui supplient pour être dites, à l'intérieur de moi. Mais je ne peux pas. Je ne peux pas les autoriser à franchir la barrière de mes lèvres. Pas quand je passe mon temps à me répéter de ne pas dire des trucs qui mettraient Phun dans une situation compliquée.

     

    On reste tous les deux immobiles dans le silence. Puis, Phun se rapproche et me prend dans ses bras. J'accepte son geste en le serrant dans les miens en retour. Parce que c'est la seule chose qu'il nous reste encore, maintenant. C'est l'unique truc qui nous rappelle que nous sommes là l'un pour l'autre. Et peu importe quel genre de relation nous avons, je me sens tellement bien quand nous nous tenons comme ça.

     

    « Noh...je suis désolé ».

     

    Il me sert plus fort et m'embrasse sur la tempe.

     

    « J'aimerais être capable de me contrôler mieux que ça mais je... »

     

    Le son de sa voix s'amenuise, remplacé par le tremblement de ses bras. Il tremble tellement que je dois me libérer de sa poigne pour me retourner et le regarder. On plonge dans le regard l'un de l'autre comme si on essayait de communiquer par les yeux ce qu'on ressent vraiment.

     

     « Je n'y arrive pas non plus », lui dis-je avant d'autoriser mes lèvres à se poser sur les siennes. Personnellement, je ne crois pas qu'on ait besoin d'étiquette. Je veux juste qu'il reste près de moi aussi longtemps que possible.

     

     Et c'est tout ce que j'ai jamais voulu.

     

     

     

    A suivre...

     

     

    (1) Si vous trouvez cette répartie étrange, eh bien sachez que moi aussi ! Je ne suis pas sûre de comprendre ce que Yuri veut dire, je pense qu'elle fait allusion au cri qu'elle vient de lâcher et qu'elle dit à Noh qu'elle voulait vérifier si les gens, étrangers pour la plupart, se retourneraient pour voir d'où il provient bien que ce soit du thaï en version originale. Bon, même avec cette explication, je ne comprends rien à cette scène.

     


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  • Chapitre 29 : la vérité revient en courant

     

    La lumière matinale éprouve des difficultés à pénétrer à travers les rideaux vu que je me suis levé une première fois à 6h pour les tirer. Pourquoi est-ce que je parle de ça, moi ? Eh bien, juste pour dire que je suis allé me recoucher tout de suite après pour ne me réveiller que maintenant. Je regarde ma montre et réalise qu'il est 9h passées depuis un moment et pourtant je suis le premier debout.

     

    Je rapatrie ma main, la montre au poignet, pour venir me frotter les yeux avant de la laisser retomber là où elle se trouvait à l'origine. Phun dort toujours, allongé sur mon bras, et je sens qu'il faut que je le pousse car je commence à être un peu ankylosé. Je ne peux m'empêcher de laisser échapper un sourire en voyant Phun dormir contre moi. Il a l'air très à son aise.

     

    Mais voilà, ça non plus je ne peux pas m'en empêcher.

     

    Slap !

     

    «  Aaaaaah...pourquoi tu me frappes ?! » crie-t-il sa tête toujours posé sur ma poitrine avant de se redresser et de la masser.

     

    « C'est déjà 9h. Tu vas dormir jusqu'au jour du départ ou quoi ? »

     

    Phun semble encore très ensommeillé, honnêtement. Ses yeux sont obstinément fermés. Sa main part à la recherche de son portable près du lit mais n'arrive pas à le trouver. A la place, je lui prête mon poignet pour qu'il puisse vérifier l'heure lui-même

     

    «  C'est. Déjà. 9h».

     

    Je le répète au cas où les petits croûtes qu'il a autour les yeux obstrueraient sa vision. Il fronce les sourcils et fixe la montre Diesel avant d'attraper ma main et de s'en servir comme d'un oreiller en la plaçant contre sa joue.

     

    « Réveille-moi à 10h.

    - Très bien, dors autant que tu veux, mais moi, je sors trouver quelque chose à manger ».

     

    Je ne vais pas le supplier, non plus. J'essaie de me lever du lit et de retirer ma main de sous sa joue mais pour quelqu'un de très fatigué, il est particulièrement résistant. Il parvient à me ramener exactement dans la position dans laquelle j'étais.

     

    « Noooon, tu restes là. On peut partir tous les deux à 10h » me dit la voix étouffé de Phun de derrière l'oreiller.

     

    « T'es drôle, toi. J'ai faim.

    - Dormons.

    - Mangeons.

    - Dormons.

    - Je veux manger.

    - dormir... »

     

    Pourquoi est-ce que ce connard est toujours aussi autoritaire ?! (et est-ce que je vais réussir à m'imposer dans une discussion un beau jour?!

    Je fronce les sourcils mais il a déjà refermé les yeux. Et en plus, il frotter son font contre moi pour se payer ma tête. Donc en gros, tu es parfaitement réveillé, hein ? Je devrais vraiment te virer de ce lit !

    Je marmonne des insultes tout en saisissant la télécommande de la télé de ma main libre. Je suppose que je peux regarder quelque chose pour tuer le temps mais mon pauvre estomac commence à râler.

    C'est réellement parfait. Cet estomac proteste plus que son propriétaire. Phun ouvre les yeux immédiatement.

     

    « Tu as faim à ce point-là ? 

    - Ouais ».

     

    Il laisse échapper un gros rire (c'est embarrassant, putain) en entendant ma réponse. (Je te le ferai payer un autre jour). Il finit par se lever et s'étirer.

     

    « D'accord, allons manger. Laisse-moi juste prendre une petite douche ».

     

    Il attrape une serviette et se dirige vers la salle de bain.

     

    Non mais ce bordel ?! Sale bâtard, tu te lèves après moi et tu veux prendre ta douche avant ?

     

    Je remue la tête en signe de défaite devant son odieux comportement, puis je change de chaîne, passant d'un film hollywoodien aux dessins-animés du matin sur la 9.

     

    « Noh ? »

     

    Hein, quoi ? Pourquoi est-ce qu'il sort la tête comme ça ?

     

    Je me retourne vers le magnifique visage de Phun, qui affiche en ce moment une expression sournoise.

     

    « Qu'est-ce que tu veux, putain ? »

     

    Notre politesse est clairement similaire, cet matin. Ne vous occupez pas de moi. Je suis très constant quand il s'agit de se montrer grossier. Phun me sourit doucement et tend la main pour m'inciter à le rejoindre dans la salle de bain. Comme d'habitude, je ne suis simplement pas d'humeur. Toutefois, il insiste et ne montre pas de signe d'abandon, du coup je me décide à me lever et à aller jusque lui avant que sa main ne se sclérose.

     

    « T'as trouve une sirène dans la baignoire ou quoi ? » lui dis-je. Je suis complètement pris au dépourvu quand il me tire à lui et m'embrasse sur le bout du nez.

     

    Putain ! Il ne s'est même pas encore lavé les dents !

     

    «  Le bisou du matin », me dit-il avant de claquer la porte pour s'enfermer dans la salle de bain.

     

    Sale fils de...hé hé.

     

    Je ne peux m'empêcher de sourire.

     

    Hé hé hé.

     

    « Noh ! Phun ! Qu'est-ce qu'il se paaaaaasse ! On va manger ? Allez ! »

     

    Les filles hurlent dans le couloir avant même que j'aie une chance de m'éloigner de la porte. Elles ont un super timing, hein ? Je ricane quand je reconnais la voix de Yuri déjà survoltée si tôt le matin.

     

    « Qu'est-ce qu'il y a, les filles ? Pourquoi vous n'avez pas appelé pour vous réveiller si vous étiez debout tôt ? »

     

    J'ouvre la porte de la chambre pour voir Yuri et Aim déjà entièrement habillées et maquillées, alors que je suis toujours en pyjama (enfin, en short de foot, pour être plus précis). Yuri me dévisage avant de me faire un grand sourire.

     

    « Tu es tellement mignon quand tu viens de te réveiller ! Tes paupières sont toutes lourdes et tes lèvres sont tellement pleines et rouges ! »

     

    Hein ? Est-ce que ce sont vraiment des compliments qu'on fait à un mec ? Je remue la tête brièvement pour essayer d'avoir l'air plus réveillé. Je ne sais pas ce que je peux faire pour les lèvres, en revanche. Je peux entendre le jet de la douche pendant un moment, puis il ouvre la porte et me tend une brosse à dents avec un peu de dentifrice dessus.

     

    « Tu es vraiment capable de parler aux gens avant d'avoir brossé tes dents ? »

     

    Hein ? Comment je suis censé communiquer, en langage des signes ? Je garde ça pour moi et prend la brosse à dents sans rien ajouter.

     

    Les filles se distraient en regardant les dessins-animés à la télé en attendant que Phun et moi soyons prêts pour aller prendre notre petit-déjeuner. Mais je suppose que ce n'est plus tellement approprié de qualifier ça de petit-déjeuner, à l'heure qu'il est. Ma montre m'indique qu'il est presque 11h.

     

    « On devrait peut-être attendre jusqu'à midi et déjeuner plutôt ? » dis-je sans m'adresser à quelqu'un en particulier.

     

    Phun tourne immédiatement la tête vers moi.

     

    « Oh, ferme-la. Ce sont les grognements de ton estomac qui m'ont réveillé.

    - C'est vrai, Noh ? »

     

    Elle, elle est rapide pour me sauter à la gorge -_-' Vraiment, ces deux-là. Je ne vois pas pourquoi il éprouve le besoin de m'humilier en public en mentionnant ça devant les filles.

     

    On mange tous les quatre au restaurant ridiculement cher de l'hôtel vu qu'on était pas d'humeur à harceler Phun pour qu'ils nous conduise ailleurs en voiture, le temps étant particulièrement chaud. Je parie qu'Ohm me ficherait une tape sur la tête s'il lisait ça. Il sait très bien que je ne suis pas très raisonnable pour ce genre de truc. (Ouais, il m'aime vraiment). Quoi qu'il en soit, c'est Yuri qu'il faut battre aujourd'hui.

     

    « Phun...j'ai envie d'un casse-croûte»

     

    Nous y voilà. Je lance un regard en biais à la fille qui fait les yeux doux à Phun alors qu'elle vient de finir son énorme « petit » déjeuner. Vous voyez ? Je vous avais dit que ça ne la gênait pas, ce genre de truc. Ah ah.

     

    « Mais où vas-tu le mettre Yu ? Est-ce que t'as pas déjà acheté des tonnes de casse-croûtes avant de venir ici ? » lui dis-je à la place de Phun parce que j'essaie d'être prévenant vis-à-vis de lui (je sais donc réellement comment être prévenant).

    Le soleil tape très fort et la chaleur est insupportable. Cependant, Yuri boude, les joues gonflées.

     

    « Y'en a plus... » répond-elle avant d'agripper le bras de Phun pour continuer sa supplique. (Hein ? C'est la copine de qui, exactement?)

     

    « S'il-te-plaît, Phun, j'ai vu un centre commercial sur la route, allons acheter des casse-croûtes. Ce n'est pas comme si on avait autre chose à faire à l'hôtel cet après-midi, de toute façon. S'il-te-plaîîîîîît ».

     

    C'est amusant d'être le témoin de cette situation et non la victime, pour une fois. Tu vois ce que ça fait, maintenant ? Hé hé.

     

    « On peut toujours y aller...mais Aim, tu pourras marcher ? »

     

    Ah oui, j'avais oublié que Phun aimait jouer les gentlemen. Il est beaucoup trop gentil pour son propre bien. Yuri se retourne vers moi pour me jeter un regard moqueur en signe de victoire.

     

    « Je ne sais pas. J'ai plutôt envie...de rester ici me reposer ».

     

    Le sourire de Yuri disparaît après avoir entendu la réplique de la fille qui se tient près d'elle/

     

    « Oh... »

     

    Je hausse les sourcils dans sa direction pour me payer sa tête à mon tour. Ah ah, pas de casse-croûte pour toi.

     

    «Mais ce n'est pas grave. Vous devriez aller avec Yu, j'attendrai ici »

     

    Hum. Ça sonne curieusement.

     

    Yuri approuve rapidement.

     

    « On va y aller avec Phun ! Noh peut rester ici avec toi. Je sais que tu es trop fainéant pour avoir envie d'y aller de toute façon, hein ? »

     

    Hein ? Hum...

     

    «  Parfait, c'est réglé alors ! S'il-vous-plaît, l'addition ! »

     

    Yuri fait encore sa Yuri, les gens Y___Y

     

    °°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°

     

    Après ça, Phun et Yuri partent en ville en voiture, nous laissant, Aim et moi à l'hôtel. Je reste dans la chambre d'Aim pour lui tenir compagnie. Nous n'avons pas de véritable conversation suivie, on parle juste parfois de la pluie et du beau temps. On regarde surtout la télé, en fait. Je me tiens assis sur le rebord du lit, la télécommande dans les mains, et je fais défiler les chaînes. De son côté, Aim est adossée à la tête de lit. Pour vous dire la vérité, c'est volontairement que je maintiens une certaine distance entre nous.

     

    « Alors, ça fait combien de temps que tu sors avec Yuri ? » demande-t-elle soudainement, ce qui me déstabilise. Ça fait combien de temps, d'ailleurs ?

     

    « Je...ne sais pas trop 

    - Combien de mois ? Ou peut-être déjà un an ? »

     

    J'essaie de me souvenir de quand a eu lieu notre rencontre.

    Le concert au couvent était en juin. Et quand est-ce que Yuri a commencé à raconter à tout le monde que j'étais son copain, déjà ? Honnêtement, je ne me rappelle pas du tout -_-'

     

    « Non, pas un an, mais je ne me souviens pas combien de temps exactement, hé hé » dis-je en réponse avec un rire embarrassé. Je ne me suis pas retourné pour la regarder, je n'ai aucune idée de l'expression qu'elle a.

     

    « Tu es vraiment adorable. Yuri est tellement chanceuse ».

     

    Hein ? Je me sens bizarre d'entendre ça. Mais il faut que je gère la situation.

     

    « Quoi, mon ami n'est pas assez beau pour toi ? Ah ah ah »

     

    A ce moment-là, je sens des mouvements sur le lit : le genre que vous sentez quand quelqu'un se rapproche de vous.

     

    « Ce n'est pas le même genre de beauté. Toi, tu es plus du style adorable ».

     

    Est-ce que c'est un compliment ? Je ne suis pas vraiment sûr. Quand je me retourne finalement, je vois Aim se glisser lentement jusqu'à moi. Mon corps se fige. Je fais semblant de ne pas remarquer ce qu'elle fait et reporte mon attention sur la télé. Des dizaines de pensées défilent dans ma tête. Les propos de Golf, comme quoi Aim était du genre à faire le premier pas, resurgissent dans mon esprit un nouvelle fois, bien que j'essaie de les oublier.

     

    Cependant, Aim ne vient pas plus près de moi. Elle se hisse jusqu'au bord du lit et se lève pour attraper un élastique afin d'attacher ses longs cheveux. Elle se retourne vers moi et me sourit.

     

    « Tu sais que toutes les filles ont frôlé la syncope quand tu es venu jouer dans notre école ? J'aimais beaucoup, aussi ».

     

    Je laisse échapper un petit soupir tout en acquiesçant dans sa direction. Franchement, si je veux être optimiste, elle est peut-être simplement en train d'essayer de me faire la conversation. Ce n'est pas juste de virer parano et d'avoir des préjugés contre elle. Son beau sourire me met quasiment en transe.

     

    « Si je savais que Phun et toi étiez proches, je t'aurais invité à sortir avec nous plus souvent.

    - Je ne pense pas que ça aurait été une bonne idée, j'aurais porté la chandelle.

    - Sûrement pas, tu es bien trop adorable. Hé, peux-tu m'aider à mettre ce collier ? Je n'arrive pas à voir le fermoir »

     

    Honnêtement, je pense quand même qu'elle insiste un peu trop sur le fait que je sois adorable. (Après tout, nous les mecs on préfère être qualifiés de beaux gosses). Je me lève et vais jusqu'à elle pour l'aider avec son pendentif. Ça ne prend qu'une seconde à fermer. Mais après, Aim se retourne brusquement au lieu de me laisser tranquillement revenir vers le lit.

     

    « Merci »

     

    Maintenant, nos visages sont à quelques centimètres l'un de l'autre. Je suis totalement déconcerté, je ne m'attendais pas à ça. Sans compter que la fille devant moi me sourit doucement, comme si la situation ne la dérangeait absolument pas. Je reste là à me demander si c'est à moi d'aller me rasseoir ou non.

     

    « Tes lèvres sont si rouges...je peux les toucher ? » me dit Aim, toujours en souriant, alors qu'elle se penche vers moi pour toucher ma bouche du bout de son doigt. Mes yeux sont plantés dans son regard audacieux.

     

    Quoi qu'il en soit, je ne veux pas de ça.

     

    « Ça te dit d'aller te promener sur la plage ? », lui dis-je alors en tournant mon visage dans la direction opposée. Je sens que ce n'est pas une bonne idée du tout qu'on reste tous les deux dans cette chambre. Malheureusement, elle se montre plus rusée que moi en répondant : « non merci, ma cheville me fait encore mal ».

     

    Le sourire qu'elle affiche donne l'impression d'appartenir à quelqu'un qui tient toutes les cartes en mains. Les lèvres pleines et roses d'Aim continue de se rapprocher.

     

    « Yuri va probablement mettre du temps à choisir ses en-cas. Ils ne seront pas de retour avant un moment.

    - Ouais... »

     

    J'ai la tête qui tourne. Les images du clip fusent dans mon crâne, je commence à en avoir des vertiges. C'est ainsi que ça se passe jusqu'à ce qu'Aim retire son t-shirt blanc. Je reviens illico à la réalité, qui est beaucoup plus limpide que le clip. Je suis ébahi. Je n'arrive p as à y croire.

     

    « Aim ,qu'est-ce que tu fais... ? ».

     

    Ce n'est pas une vraie question. J'essaie juste de rappeler à la fille qui est en face de moi qu'on ne devrait pas faire un truc comme ça. Toutefois, tout ce que j'obtiens en réponse est un sourire suffisant.

     

    « Si tu es d'accord, j'aimerais bien qu'on se voie en tête à tête plus souvent tous les deux ».

     

    Son corps mince se rapproche si près de moi que l'on finit par se toucher. Elle attrape ma main et la place sur son soutient-gorge.

     

    « Tu crois que tu peux... ? »

     

    Je sais pertinemment bien que ce n'est pas un test comme avec Yuri. Je suis un mec. Je ne peux pas nier que cette expérience risquée et excitante me met totalement en appétit. Son odeur fabuleuse titille tous mes sens alors qu'elle presse son corps tendre contre le mien. La situation me laisse deviner tout ce qu'elle a à offrir. Cela va au-delà de la capacité de qui que ce soit de contrôler son désir. Aim fait courir ses lèvres contre mon cou et les fait remonter jusqu'à mes oreilles tout en glissant ses mains sous mon t-shirt pour caresser ma poitrine avec une certaine agressivité. Mon corps cesse de répondre à mon commandement. Je ne peux qu'entendre Aim murmurer dans mon oreille qu'elle a désespérément envie de moi comme si elle récitait une incantation. Ses effets magiques semblent fonctionner car je commence à balader mes mains moites sur son dos. Finalement, j'atteins les crochets de son soutient-gorge...

    C'est la copine de mon ami !

    Cet ami est Phun !

    Et Phun est plus qu'un ami pour moi !

     

    « AIM ! ».

     

    Je refuse de la laisser encore altérer ma conscience des choses. Mon cri la fait tressaillir légèrement mais elle ne cesse pas pour autant son rentre-dedans.

     

    « Tu es déjà d'humeur, pourtant.

    - Aim ! »

     

    Je la repousse brusquement aussi loin que mon bras me le permet. Je ne voulais pas en arriver là car je vois à son expression que je lui ai fait mal. Mais c'est le seul moyen de m'arrêter moi-même. Je prends une longue respiration avant d'attraper une serviette et de l'enrouler dedans.

     

    « Je serai juste dans la chambre d'à côté. Si tu as besoin de quoi que ce soit, viens toquer. Tu devrais te reposer », lui dis-je parce que je veux pas hurler ou l'engueuler. Je fais attention à être correctement vêtu avant de quitter le chambre.

     

    Pour être franc, je n'ai rien à lui dire.

     

    La seule personne dans mon esprit est Phun.

     

    Parce que Golf a dit la vérité.

     

    A suivre...

     

     

     


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